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Nord Stream est un gazoduc sous-marin reliant la Russie à l’Allemagne via la mer Baltique, destiné à acheminer du gaz naturel russe vers l’Europe.
Ces deux pipelines, qui assurent le transport de gaz sous pression, sont administrés par un consortium dont la tête est la compagnie russe Gazprom. Ils établissent une connexion entre la Russie et l'Allemagne par l'intermédiaire de la mer Baltique : Nord Stream 1 et Nord Stream 2 :
Nord Stream 1 Gazoduc opérationnel, créé en 2011, long de 1 224 kilomètres. Cette infrastructure permettait chaque jour le transit de 170 millions de mètres cubes de gaz de la Russie vers l'Allemagne (source : BBC, 2022).
Nord Stream 2 Gazoduc créé en 2021 et long de 1 230 kilomètres. Ayant les mêmes capacités que le premier gazoduc, il aurait permis de doubler l’approvisionnement de gaz russe vers l’Europe – pour un coût total du projet avoisinant les 9 milliards d’euros (source : Touteleurope.eu, 2021).
À ce jour, les deux réseaux Nord Stream sont actuellement hors service. Le premier est à l’arrêt depuis septembre 2022 pour maintenance. Le second, lui, n’a jamais été mis en service en raison de l’invasion de l’Ukraine par la Russie et des tensions avec l’Union européenne.
La société Nord Stream AG est propriétaire du gazoduc Nord Stream, dans sa version 1 et 2.
Mais derrière cette entreprise se cache un consortium, c’est-à-dire un regroupement de plusieurs multinationales. Gazprom est le principal actionnaire de Nord Stream AG. Tandis que Wintershall Dea, PEG Infrastruktur AG (une filiale d'E.ON Beteiligungen) ainsi que la société française Engie détiennent des parts moins significatives.
À noter : au vu des bénéfices potentiels et de la sécurisation de l’approvisionnement, ces deux projets étaient considérés comme « d’intérêt européen » par le Parlement européen. Pourtant, les événements géopolitiques liés à la guerre en Ukraine semblent aujourd’hui contredire cette vision.
À la suite de l'invasion de l'Ukraine par la Russie en février 2022, l'approvisionnement en gaz russe a fait l’objet de nombreuses controverses.
Selon les sources étatiques officielles, dès février 2022, l'UE a adopté des sanctions contre la Russie en réponse à l'agression militaire contre l'Ukraine. Au total, treize séries de sanctions ont été mises en place sur une période de deux ans, incluant des sanctions spécifiques liées au secteur énergétique (source : European Commission, 2025) :
Embargo énergétique : interdiction totale d’importation de charbon et de gaz de pétrole liquéfié (GPL) russe, avec une exemption temporaire pour les contrats existants (12 mois max).
Blocage des projets GNL russes : interdiction d’investissements, d’exportations liées et d’utilisation des ports de l’UE pour leur transbordement.
Restrictions sur les terminaux de GNL : interdiction d’importer dans ceux non reliés au réseau gazier européen.
Gel des investissements énergétiques : interdiction dans le secteur minier, pétrolier et gazier russe (sauf nucléaire civil ou transport d’urgence).
Fin du stockage et des importations : interdiction pour les Russes de réserver du stockage de gaz en UE, fin des importations de pétrole par oléoduc pour l’Allemagne et la Pologne.
En parallèle, l'Europe a graduellement réduit ses importations énergétiques russes, coupant 90% des approvisionnements en pétrole russe dès fin 2022 – avant que les importations de combustibles russes dans l'UE rebondissent de nouveau en 2024. En ce qui concerne la France, elle n'est pas en reste : « D'après le think tank IEEFA, elle a accru ses importations de GNL russe de 81% entre 2023 et 2024, versant ainsi 2,68 milliards d'euros à la Russie » (source : Touteleurope.eu, 2025).
L'approvisionnement en gaz russe soulève des questions morales car il finance indirectement un régime autoritaire. Au-delà de ces considérations, la dépendance aux hydrocarbures lointains représente une vulnérabilité stratégique majeure. Les pays exportateurs utilisent alors l'énergie comme arme diplomatique avec plusieurs techniques bien rodées :
L’Europe a brutalement pris conscience des risques liés à sa vulnérabilité énergétique, alors même qu’elle qualifiait Nord Stream de projet « d’intérêt européen ».
Le 26 septembre 2022, deux explosions sous-marines d'une magnitude de 1,9 et 2,3 ont été enregistrées par l'institut de sismologie suédois au large de l'île danoise de Bornholm, sabotant les gazoducs Nord Stream 1 et 2 en mer Baltique.
Dès le 27 septembre, la station de mesure suédoise de Hyltelmossa, située à 500 km du Danemark, a détecté un pic inhabituel de méthane avec une concentration augmentée de 10 à 15 %. Des concentrations similaires ont été rapidement mesurées au Danemark, en Suède, en Norvège et en Finlande.
Les enquêtes suédoises ont confirmé la présence de traces d'explosifs sur les sites, tandis que le procureur fédéral allemand a ouvert une investigation et émis un mandat d'arrêt contre un ressortissant ukrainien soupçonné d'avoir mené l'opération depuis un voilier parti d'Allemagne.
Ces destructions ont définitivement fermé cette voie d'approvisionnement, accélérant la stratégie énergétique bas-carbone de l’Union Européenne.
Les quatre fuites détectées sur les Nord Stream 1 et 2 ont transformé ces gazoducs en véritables bombes climatiques, aux lourdes conséquences environnementales.
Voici donc les effets en cascade liés à ces fuites de méthane (source : Nature, 2025) :
Les gazoducs Nord Stream 1 et 2, se sont transformés en leviers de pression significatifs suite à l'invasion de l'Ukraine par la Russie.
Il semblerait que officiellement, le projet de gazoduc Nord Stream serait toujours au point mort, mais les fuites dans la presse suggèrent le contraire. Explications.
D’après un article paru sur Courrier International (2025), la Maison-Blanche mènerait des débats internes à Washington sur une éventuelle levée des sanctions visant Nord Stream 2, le gazoduc reliant la Russie à l’Allemagne via la mer Baltique.
Le gazoduc Nord Stream 2, bien que partiellement détruit lors de l’explosion de 2022, reste en partie opérationnel, ce qui laisse envisager une possible relance, si l’Allemagne donnait son feu vert — raison pour laquelle les États-Unis « lorgneraient sur les gazoducs », selon Courrier International.
Cette hypothèse embarrasse toutefois la Maison-Blanche – qui a catégoriquement rejeté ces suppositions. En effet, relancer Nord Stream 2 représenterait une faute morale majeure pour plusieurs raisons :
Ces récentes perturbations du secteur gazier révèlent avec acuité les failles structurelles du système énergétique européen.
Ces dysfonctionnements exposent trois vulnérabilités majeures qui fragilisent l'ensemble du continent :
Incapacité à maîtriser l’évolution des prix du gaz : l'Europe se trouve dans l'incapacité de contrôler les fluctuations des cours gaziers, subissant de plein fouet une volatilité des prix qui déstabilise son économie.
Aggravation de l’instabilité économique : cette dépendance énergétique intensifie l'instabilité économique à l'échelle du continent, créant des effets domino qui stimulent l'inflation et affectent le pouvoir d'achat des citoyens, convertissant chaque friction géopolitique en possible crise pour les secteurs industriels.
Renforcement de la vulnérabilité des infrastructures énergétiques : ces crises mettent crûment en lumière la fragilité des infrastructures énergétiques européennes, soumises aux aléas géopolitiques et aux dérèglements des marchés mondiaux – au péril de la sécurité d’approvisionnement.
Cette fragilité découle d’une dépendance énergétique massive au gaz russe. L'Europe demeure massivement tributaire du gaz russe.
Les chiffres concernant la France sont encore plus révélateurs : elle est le deuxième plus grand importateur de gaz naturel russe, derrière les États-Unis. Une position ambivalente, comme le souligne Greenpeace dans un communiqué daté du 2 juin 2025 : « Si la France, aux côtés de l’Union européenne, affiche une posture de fermeté face à Moscou, la réalité est plus contrastée ».
Les chiffres parlent d'eux-mêmes : depuis le début de l'invasion de l'Ukraine en février 2022, l'Union européenne a importé pour environ 209 milliards d'euros d'énergies fossiles en provenance de Russie, selon les estimations du Centre for Research on Energy and Clean Air (CREA) . Parallèlement, le soutien financier total de l'UE à l'Ukraine est estimé à environ 139,2 milliards d'euros, d'après le Conseil européen (source : Greenpeace, 2025).
Ainsi, face à cette crise énergétique, il est impératif pour l'Europe, et spécifiquement pour la France, de rompre sa dépendance à l'égard de la Russie. Une stratégie durable sur le long terme exigerait alors une diversification des sources, le développement d'énergies renouvelables à l'échelle locale, ainsi que la mise en place de réserves stratégiques.
L'autonomie énergétique devient ainsi un impératif de sécurité nationale autant qu'un choix environnemental et moral.
Nord Stream 1 : pourquoi ce gazoduc est-il si important, BBC, 2022, https://www.bbc.com/afrique/articles/c0wzz97zzk3o
Russie: faisant face à de graves difficultés financières, Gazprom envisage des licenciements, RFI, 2025, https://www.rfi.fr/fr/europe/20250113-russie-faisant-face-%C3%A0-de-graves-difficult%C3%A9s-financi%C3%A8res-gazprom-envisage-des-licenciements
L'Europe peut-elle se passer du gaz russe, Représentation en France, 2024, https://france.representation.ec.europa.eu/informations/leurope-peut-elle-se-passer-du-gaz-russe-2024-05-16_fr
Les hydrocarbures en Russie, Académie de Créteil, http://edd.ac-creteil.fr/IMG/pdf/Proposition_energie_HG_lycee.pdf
Ukraine : pourquoi l'Union européenne est encore …, Public Sénat, 2025, https://www.publicsenat.fr/actualites/environnement/ukraine-pourquoi-lunion-europeenne-est-encore-dependante-des-hydrocarbures-russes
L'Union européenne dévoile son plan pour mettre fin aux …, Touteleurope.eu, 2025, http://Touteleurope.eu
L’énorme quantité de méthane qui a fuité des gazoducs Nord Stream, CEA, 2025, https://www.cea.fr/drf/Pages/Actualites/En-direct-des-labos/2025/enorme-quantite-methane-fuite-gazoducs-nord-stream.aspx
Hidden environmental danger of the Nordstream pipeline explosions, Phys.org, 2023, https://phys.org/news/2023-03-hidden-environmental-danger-nordstream-pipeline.html
Sanctions en matière d'énergie - Commission européenne, European Commission, 2025, https://commission.europa.eu/topics/eu-solidarity-ukraine/eu-sanctions-against-russia-following-invasion-ukraine/sanctions-energy_fr
Business is Business : La France complice de l'effort de guerre russe, Greenpeace, 2025, https://cdn.greenpeace.fr/site/uploads/2025/05/DP-Business-is-Business-_-La-France-complice-de-leffort-de-guerre-russe.pdf
[Action] Business is business - Greenpeace dénonce le commerce de la France avec la Russie en pleine guerre en Ukraine, Greenpeace, 2025, https://www.greenpeace.fr/espace-presse/action-business-is-business-la-statue-demmanuel-macron-restituee-ce-soir-devant-le-siege-dedf-symbole-toxique-des-contrats-entre-la-france-et-la-russie/
Énergie. Les importations européennes de gaz naturel liquéfié russe ont atteint un niveau “record” en 2024, Courrier International, 2025, https://www.courrierinternational.com/article/energie-les-importations-europeennes-de-gaz-naturel-liquefie-russe-ont-atteint-un-niveau-record-en-2024_226372