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L’agroécologie pourrait-elle être l’avenir de l’agriculture ?
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L’agroécologie pourrait-elle être l’avenir de l’agriculture ?

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Loin d'être une lubie, l'agroécologie pourrait permettre à notre société de développer un mode de production pérenne et bénéfique à plus d'un titre. Zoom.
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2024-11-22T00:00:00.000Z
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L'agroécologie regroupe un ensemble de méthodes agricoles, loin d'être nouvelles, puisqu'elles s’enracinent dans les pratiques de nos ancêtres : cultiver la terre en tenant compte de l’ensemble de son écosystème (sol, eau, biodiversité, etc.). Face aux défis contemporains, elle s'érige comme une solution : une agriculture plus raisonnée, respectueuse et résiliente.

Cet article vous explique pourquoi.

Agriculture conventionnelle : où le bât blesse-t-il ?

L’agriculture conventionnelle désigne une technique de production agricole fondée sur des pratiques standardisées et mécanisées, utilisant des produits chimiques de synthèse pour optimiser les rendements (source : MIT Climate Portal, 2020)

Face aux dérèglements climatiques (sécheresse, inondations, etc.), ce type d'agriculture, mal adapté aux aléas climatiques, en pâtit, et contribue à aggraver ces déséquilibres, épuisant les ressources et perturbant les écosystèmes naturels. Explications.

Les impacts de l'agriculture intensive et des intrants chimiques

Après la Seconde Guerre mondiale, dans un contexte de pénurie alimentaire et d'importations massives, l’agriculture se modernise en France. Pour atteindre l’autosuffisance partielle, c’est-à-dire produire suffisamment de nourriture pour répondre aux besoins internes du pays, plusieurs techniques sont adoptées :

  • la mécanisation et la standardisation des processus agricoles : passage d’une agriculture manuelle en polyculture (culture de plusieurs espèces végétales) à une agriculture mécanisée en monoculture (culture d’une seule espèce).
  • l’utilisation d’intrants chimiques : l’agriculture passe des intrants naturels (fumier, compost) aux produits chimiques (engrais azotés, phosphatés, etc.).
  • la sélection génétique des cultures et des animaux : développement de variétés sélectionnées pour leurs rendements.

Ces transformations s’accompagnent d’une restructuration profonde des exploitations agricoles en France, marquée par une diminution du nombre d'exploitations et une augmentation de leur taille moyenne (INSEE, 2020). L’agriculture intensive et mécanisée s’établit petit à petit en France, sans prendre en compte les enjeux environnementaux.

Cette approche à court terme perturbe l’équilibre des écosystèmes, épuise les ressources et entraîne des conséquences environnementales et sociales. Elle vide les sols de leurs nutriments essentiels en raison de la monoculture et de l’usage intensif d’engrais ou de pesticides, ce qui nuit à la biodiversité environnante, pollue les cours d’eau (les produits chimiques se retrouvant dans les nappes phréatiques, puis dans les rivières) et perturbe les cycles naturels de l’eau et du carbone organique.

NB : le carbone organique dans les sols est une matière provenant de la décomposition des plantes et des organismes vivants. Il est essentiel à la fertilité du sol, car il améliore la rétention d’eau et des nutriments. L’utilisation de produits chimiques et le labour intensif accélèrent la perte de carbone organique dans les sols, libérant du dioxyde de carbone dans l’atmosphère, aggravant l’érosion et réduisant la capacité des sols à retenir l’eau.

Enfin, socialement, l’agriculture conventionnelle se caractérise par des conditions de travail précaires, dues à la pression sur les rendements, la saisonnalité, les horaires irréguliers, ainsi qu’à l’exposition aux produits chimiques et à la dépendance à des intrants chimiques coûteux.

Ce constat est d’autant plus préjudiciable dans un contexte de changement climatique, où les catastrophes climatiques extrêmes et la raréfaction des ressources s’accentuent.

Maladaptation du modèle agricole aux enjeux climatiques

L’augmentation de la température moyenne (soit + 1,48 °C par rapport au niveau préindustriel, source : Climate Copernicus, 2023) entraîne plusieurs impacts notables sur l’agriculture en France :

  • perturbation du cycle de l’eau : les cultures seront exposées à un risque de sécheresse dans le sud et d’inondations dans le nord.
  • perturbation des cycles de croissance des cultures : les périodes de végétation et des récoltes seront modifiées et les rendements pourraient être impactés.
  • augmentation des maladies et des ravageurs : la hausse des températures favorise la prolifération de certaines maladies et insectes nuisibles.
Dans un contexte où les enjeux climatiques deviennent plus pressants, l'agriculture conventionnelle est mal adaptée aux défis contemporains (épuisement des ressources, catastrophes climatiques, etc.) et met en péril la souveraineté alimentaire.

Le dogme d’une agriculture intensive et rentable dans un monde aux ressources appauvries et fragilisées semble donc compromis. Comment le modèle agricole peut-il se réinventer ?

L'agroécologie : clé d'un modèle agricole résilient

L’agroécologie, selon Pierre Rabhi, pionnier de ce mouvement, s’inspire des lois de la nature. Il prône une agriculture en harmonie avec celle-ci et l’illustre ainsi :

« Se ré-inclure dans le cycle de la Vie, en symbiose avec la terre, le végétal et l’animal n’est pas un retour en arrière mais une évidente et urgente réconciliation avec les lois irrévocables de la vie ». 

Définition de l’agroécologie et de ses 12 fondamentaux

Il n'existe sans doute pas de meilleure définition de l'agroécologie que celle proposée par Pierre Rabhi. Agronome, écrivain et penseur, il est reconnu pour avoir largement contribué à l'essor de cette pratique en France grâce à son association Terre & Humanisme, ainsi qu'en Afrique, sa terre d’origine.

Pierre Rabhi définit l’agroécologie comme une pratique agricole qui va au-delà de la simple technique, et prend en compte l’ensemble du milieu environnant, en intégrant des aspects comme la gestion de l’eau, le reboisement, la biodiversité, ainsi que les enjeux économiques et sociaux (Vers la sobriété heureuse. Actes Sud, Pierre Rabhi, 2010).

L’association Terre & Humanisme, qu’il a fondée, précise les 12 fondamentaux de l’agroécologie :

  1. Des valeurs paysannes : valoriser les écosystèmes naturels et les savoir-faire paysans.
  2. Une vision à taille humaine : développer des pratiques agricoles à taille humaine.
  3. Vers l’autonomie : optimiser et valoriser l’usage des ressources naturelles pour viser l’autonomie.
  4. Un sol vivant : travailler le sol de manière minimal de sorte à ce qu’il conserve ses qualités intrinsèques afin de favoriser sa fertilité. 
  5. Une biodiversité préservée et un patrimoine animal diversifié : protéger les espèces végétales et animales adaptées au terroir.
  6. Un système favorable à la bonne santé des plantes : observation du milieu naturel plutôt que de l’application directe d’intrants chimiques ou de pesticides.
  7. L’animal, un rôle essentiel : considérer les animaux comme partie intégrante de l'agroécologie. Ils favorisent la fertilité des sols, contrôlent les parasites, et enrichissent les écosystèmes agricoles naturellement.
  8. L’eau : économie, optimisation et récupération de la ressource hydrique.
  9. L’arbre multiservices : créer une relation symbiotique entre arbres, cultures et élevages.
  10. Un habitat cohérent : utilisation de matériaux locaux, écologiques pour éco-concevoir des bâtiments et limiter l’usage des ressources naturelles. 
  11. Énergie : optimiser la consommation énergétique en privilégiant l’utilisation d’énergies renouvelables.
  12. Une économie locale dynamique et une sobriété heureuse : favoriser la coopération plutôt que la compétition, les circuits-courts et promouvoir un mode de vie sobre.

Les 12 fondements de l'agroécologie forment un ensemble de pratiques agricoles qui vont au-delà de la pratique en elle-même, c’est une invitation à écouter, observer, comprendre les éléments naturels présents dans son environnement. Sur le plan social, il s'agit d'une agriculture plus équitable et régénératrice. C’est un appel à la sobriété heureuse, selon les mots de Pierre Rabhi, visant un mode de vie en harmonie avec la nature. 

Comment l'agroécologie peut-elle répondre aux enjeux de demain ?

L’agroécologie peut répondre aux enjeux de demain car elle considère l’écosystème dans sa globalité, s’appuyant sur ses symbioses naturelles pour faire face aux défis agricoles majeurs plutôt que sur des artifices. C’est une vision à long terme, qui va au-delà des solutions immédiates pour préparer les enjeux futurs.

L'agroécologie améliore la résistance des cultures aux événements climatiques extrêmes, comme les sécheresses prolongées, en préservant la structure du sol et en optimisant l'utilisation de l'eau (récupération de l’eau de pluie, irrigation goutte-à-goutte, etc.).

Par exemple, la rotation des cultures, qui consiste à alterner chaque année les espèces cultivées, ainsi que la polyculture, aident à réduire les pertes de récoltes en favorisant la diversité des espèces et en limitant les effets des maladies et des ravageurs. En période d’inondations, les sols régénérés par l'agroécologie retiennent mieux l’eau, réduisant ainsi le ruissellement et la perte de nutriments essentiels à la production.

Enfin, l’agroécologie favorise l'autonomie des agriculteurs en réduisant leur dépendance aux intrants chimiques, souvent coûteux et polluants. Elle prône avant tout une économie locale dynamisée grâce aux circuits courts et renforçant ainsi la souveraineté alimentaire des communautés locales.

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D'une agriculture standardisée à une agriculture en symbiose avec la nature

À partir des 12 fondamentaux de l’agroécologie, comment l’agriculture conventionnelle peut-elle converger vers des pratiques agricoles plus soutenables et résilientes ?

Passer de la monoculture à la polyculture

On entend par monoculture, un espace agricole dédié à la culture d’une seule et même espèce durant plusieurs années. Si une seule espèce est cultivée, cela entraîne un appauvrissement des espèces animales et végétales de l'écosystème. En outre, la monoculture augmente le risque d'infestation par des ravageurs et des maladies, qui, face à une monoculture, peuvent se propager rapidement et détruire des cultures entières en se nourrissant exclusivement de la même espèce.

En France, environ 47 % des terres agricoles sont dédiées à la monoculture, principalement pour les céréales comme le blé et le maïs (source : Le compte prévisionnel de l’agriculture pour 2023, INSEE, 2023). 

Si l’on en revient aux pratiques vertueuses de l'agroécologie, la monoculture serait donc contraire à son principe. Il faudrait tendre plutôt vers la polyculture, qui se définit comme la culture de plusieurs espèces végétales sur une même parcelle. La diversité des cultures favorise non seulement la fertilité des sols et lutte contre l’érosion, mais elle joue également un rôle clé dans l’augmentation de la biodiversité. La culture de différentes espèces végétales crée un lieu de vie propice au développement d'une multitude d'espèces, rétablissant alors un écosystème équilibré où la faune et la flore locales trouvent refuge et nourriture. 

En France, la diversification des cultures peut être une pratique résiliente et prometteuse pour garantir la sécurité alimentaire dans les conditions méditerranéennes semi-arides (source : Lopez et al., 2022).

L’Agroforesterie : une alliée au service des cultures agricoles

La culture des terres agricoles, aussi appelée terres arables, doit aussi s’accompagner d’une agroforesterie adaptée. Le concept d’agroforesterie a été introduit dans les années 1970, et selon l'Association de l'Agroforesterie Française, il désigne l’ensemble de pratiques agricoles qui associent, sur une même parcelle, des arbres (sous toutes leurs formes : haies, alignements, bosquets, etc.) à une culture agricole et/ou de l’élevage.

Les arbres jouent un rôle important dans les écosystèmes : ils captent du dioxyde de carbone (CO2) et libèrent de l’oxygène. Ils régulent le cycle de l’eau, en réduisent le ruissellement et limitent l’évaporation. Ils sont un rempart naturel contre les intempéries et créent un habitat pour la biodiversité, en fournissant de l’ombre et de la nourriture. 

L'agroforesterie s'intègre naturellement à l'agroécologie : ces pratiques se complètent et interagissent en synergie, renforçant ainsi la résilience des cultures.

Les écosystèmes naturels font preuve d’une grande résilience dont il est urgent de s’inspirer pour la conduite des agroécosystèmes. En effet, la forêt (spontanée) crée en permanence de l’humus et de la fertilité là où l’agriculture conduit trop souvent à une dégradation des milieux. (source : Association de l'Agroforesterie Française).

L'agroécologie : des concepts à la pratique

L’agroécologie n’est pas seulement un concept moderne ; elle s’enracine dans les pratiques de nos aînés et peut facilement être mise en œuvre, que ce soit à grande échelle ou dans votre propre jardin. 

Vous souhaitez mettre en pratique un projet d’agroécologie ? Sollicitez l’aide des Chambres d'Agriculture, qui accompagnent les agriculteurs dans leur transition où rapprochez-vous des Collectifs Agroécologiques (collectifs d'agriculteurs), qui fédèrent les agriculteurs porteurs de projet agroécologique.

Quels exemples concrets d’agroécologie peut-on trouver dans l’agriculture d'aujourd'hui ?

L’agroécologie est en plein essor. En France, plus de 12 000 fermes agroécologiques existent (Source : Gouvernement, 2021). Elles adoptent diverses pratiques : engrais naturels, compostage, polyculture, utilisation d'arbres fruitiers et de haies, récupération d’eau de pluie, etc.

Concrètement, que font ces fermes pour entamer leur transition vers l’agroécologie ? Voici quelques exemples de pratiques agroécologiques :

  • Réduction des pesticides et intrants chimiques : utilisation de biopesticides (prédateurs naturels), désherbage mécanique plutôt que chimique...
  • Remplacer les engrais chimiques par des engrais naturels : mettre du compost, fumier ou engrais verts (trèfle, lupin, moutarde, purin de plantes) enrichissent le sol en azote et autres nutriments.
  • Travail des cultures :  polyculture (par exemple, légumes, légumineuses et céréales), mise en place d’un plan de rotation des cultures, culture de plantes à racines profondes ou de plantes couvre-sol (trèfles ou phacélie) pour enrichir et renforcer la structure du sol.
  • Biodiversité : culture de plantes mellifères (attire les insectes butineurs), création de zone tampon (en friche), élevage d’animaux locaux ou rustiques, moins dépendants aux traitements antibiotiques.
  • Agroforesterie : intégration d’arbres fruitiers et de haies dans l’espace cultivé.
  • Gestion de la ressource en eau : récupération d'eau de pluie, irrigation économe en goutte-à-goutte, terrains en terrasse (pour ralentir le ruissellement de l’eau).
  • Impact social : agrotourisme (chambre d’hôte, visite de ferme, ateliers de sensibilisation), insertion de personnes en situation précaire ou handicap…

Un exemple notable de ferme agroécologique est la Ferme du Vivant dans le Var, qui combine agroforesterie, élevage et culture diversifiée. Cette exploitation agricole située dans le Var sur 45 hectares, est un projet collaboratif qui a évolué d’une production de foin vers une ferme en agriculture biologique diversifiée. Elle combine agroforesterie (culture d’oliviers), élevage de porcs noirs de Bourdeaux, une race locale en voie de disparition, maraîchage et transformation des produits animaux. Son engagement va au-delà, avec le financement d’un pôle de recherche pour l’association “Cochon Noir de Provence” et la proposition d’agrotourisme, incluant chambres d’hôtes et séminaires.

Comment introduire l'art de l'agroécologie dans son quotidien ? 

Si vous souhaitez faire votre part du colibri, comme disait Pierre Rabhi, et pratiquer l'art de l'agroécologie à votre échelle, sachez que cela est à la portée de tous.

Que vous ayez un grand terrain ou un petit jardin, l’agroécologie peut faire partie de votre quotidien. Explications.

Si vous disposez d’un potager, il est possible de pratiquer plusieurs techniques comme la rotation des cultures, la polyculture... Pour préserver les qualités intrinsèques de votre sol, il est préférable d’utiliser des méthodes naturelles pour le traitement des espèces (cendre, savon noir, etc.), et adoptez le compostage ou le paillage pour enrichir votre sol et maintenir l'humidité.

Même sans potager, l’agroécologie trouve sa place dans votre vie de tous les jours. Par exemple, en semant des plantes mellifères ou en aménageant des refuges pour les oiseaux, vous participez à la préservation de la biodiversité et à la restauration de votre environnement.

Pour aller plus loin : comment se former à l'agroécologie ?

On peut suivre une formation à l’agroécologie de manière accompagnée ou autodidacte. 

Pour se former à l'agroécologie, il est recommandé de se tourner vers des organismes reconnus en France, tels que l’association Terre & Humanisme (fondée par Pierre Rabhi), la Confédération Paysanne (syndicat d'agriculteurs engagés) ou l’association Terre de liens.

L’agroécologie peut également être apprise sur les bancs de l’école grâce au programme MOOC Agroécologie proposé par l’Institut Agro de Montpellier, en partenariat avec l’Université de Montpellier. Ce MOOC offre une formation aux bases scientifiques de l'agroécologie, avec une approche interdisciplinaire qui combine des domaines tels que l’agronomie, l’écologie, l’anthropologie et les sciences du sol. Pour participer à ce programme, il suffit d’être inscrit(e) à l’université.

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