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Qu'est-ce que le délit d'écocide ?
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Blog > Écologie > Qu'est-ce que le délit d'écocide ?

Qu'est-ce que le délit d'écocide ?

ÉcologieRéchauffement climatique
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plante et rochers aquatiques sur fond vert
Les dommages envers l’environnement doivent-ils être élevés au rang de crime ? Zoom sur la notion d’écocide et la bataille judiciaire qui en découle.
Écologie
2024-11-13T00:00:00.000Z
fr-fr

Le mois de mars 2024 vient de battre un bien triste record : la concentration de CO2 dans l’air a gagné un niveau qui n'avait pas été atteint depuis au moins 14 millions d’années. En cause ? Les activités humaines. Elles sont en train de détruire notre lieu de vie à petit feu, c'est pourquoi il est temps d’agir avec des sanctions fortes. C’est dans ce contexte que l'écocide apparaît au Journal Officiel en 2021, après de nombreux tumults et refus au cours des 50 dernières années.

Mais reprenons les choses dans l’ordre. Que signifie "écocide" ? Est-ce bien un "crime d'écocide" dont il est fait mention dans les textes officiels ? Pourquoi la mention d'écocide a fait tant débat ? Greenly vous explique son histoire.

L'écocide, définition

L’étymologie du mot « écocide » ne laisse pas de place au doute quant à sa signification. Construit à partir de la racine grecque « Eco » qui signifie « la maison », il est suivi du suffixe « cide » issu du latin « caedere », signifiant « tuer ».

Ce terme est également fondé sur l’association des mots « écosystème » et « génocide ».

Autrement dit, l’écocide renvoie à la destruction massive d’écosystèmes, en partie ou dans leur totalité.

Quelles sont les activités à l’origine de ce désastre ?

Un tour d’horizon des activités préjudiciables

Sans surprise, l’exploitation excessive de l’environnement par l’activité humaine est la cause de la plupart des maux de la planète. On trouve ainsi :

  • la déforestation massive ;
  • la surpêche ;
  • le déversement chimique et de pétrole ;
  • l’exploitation minière ;
  • les forages pétroliers ;
  • la pollution plastique, agricole et de l’air ;
  • les armes chimiques, la contamination radioactive et les essais nucléaires ;
  • le trafic d’espèces protégées ;
  • le transfert ou le déversement illégal de déchets ;
  • les industries agricoles, du ciment et de combustibles fossiles. 

Un exemple ? En 2021, selon la première étude portant sur les atteintes à l’environnement en France, les forces de l'ordre ont dénombré 31 400 infractions environnementales. Ce chiffre est en hausse de 7 % par rapport à 2016.

Étant à l’origine de ces dégâts, les dirigeants des grandes entreprises et les responsables politiques sont particulièrement visés par le délit d’écocide. Selon le rapport de l’ONG Carbon Disclosure Project (CDP) réalisé en 2017, 100 entreprises - majoritairement des industries pétrolières - sont responsables de 71 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre entre 1988 et 2015.

Quelques exemples marquants

Les conséquences des crimes qui portent atteinte à l’équilibre des milieux naturels sont légion :

  • l’exploitation pétrolière par Chevron Texaco en Amazonie. Entre 1964 et 1992, la société américaine Chevron Texaco creuse des puits de pétrole et des bassins de rétention provoquant des fuites et polluants les points d'eau. Ces activités empoisonnent ainsi 30 000 habitants et provoquent des dégâts irréversibles sur l’environnement ;
  • les marées noires causées par plusieurs naufrages au fil de l’Histoire (l’Erika, l’Amoco Cadiz ou le DeepWater Horizon). Le déversement du pétrole cause la pollution du rivage et la disparition par asphyxie d’espèces marines, d’oiseaux, la faune ainsi que la flore, compromettant la chaîne alimentaire ;
  • la déforestation en Amazonie, en Indonésie et en Malaisie. En cause, l’élevage de bovins pour la production de viande et la production d’huile de palme et de bois. À titre d’illustration, de janvier à avril 2022, la forêt Amazonienne a perdu 1 900 km² de surface. Cela cause la disparition d’espèces, la contamination de l’eau et la destruction de la capacité d’absorption de ce puits de carbone naturel. Auparavant, la forêt tropicale pouvait stocker entre 80 et 120 milliards de tonnes de carbone qu’elle relâche désormais dans l'atmosphère, aggravant ainsi le réchauffement climatique ;
  • l’assèchement de la Mer d’Aral située entre le Kazakhstan et l’Ouzbékistan. Le quatrième plus grand lac de la planète a disparu en 50 ans à cause de la culture du coton, très gourmande en eau. Asséché, le lac gagne en salinité et les pesticides viennent dans l'eau tuant ainsi toute forme de vie ;
  • les accidents nucléaires de Fukushima et de Tchernobyl, dont les particules toxiques sont parvenues dans toute l'Europe causant des cancers et contaminant la nature. Les zones autour des centrales sont encore inhabitables, de par leur taux de radioactivité encore particulièrement élevé.

Le délit d’écocide peine à se faire connaître

1970 : la naissance de la notion d’écocide

L'écocide trouve son origine pendant la Guerre du Vietnam. Lors de l’opération Ranch Handau, l’armée américaine utilise « l’agent orange » afin de déloger leur ennemi. En effet, il leur est quasiment impossible d’avancer face aux forêts denses, aux champs et aux mangroves.

Alors quoi de mieux que de les détruire chimiquement ?

Dès 1961, l’armée américaine épand la végétation de ce défoliant chimique extrêmement toxique - de par sa teneur en dioxine - afin de détruire toute forme de vie - végétale comme animale. 

Pendant dix ans, pas moins de 80 millions de litres de produits chimiques seront déversés sur le Vietnam dans l’unique but d’empêcher leur ennemi de se nourrir et de se cacher. De fait, on estime que 20 % des forêts et 30 % des mangroves du Sud du Vietnam sont ravagées. Rien ni personne n’est épargné. Les humains exposés à cet herbicide développent des cancers et des malformations.

Un désastre écologique et humain.

En 1970, alors fermement opposé à l’utilisation qu’en font les Américains, le biologiste Arthur Galston - qui a participé au développement des substances présentes dans l’agent orange - souhaite créer « un nouvel accord international pour interdire l’écocide ». Il est ainsi à l’origine de ce terme qu’il caractérise comme une  « destruction délibérée de l'environnement ».

‍Or, à l’époque et même si ce nouveau terme intrigue, il passe vite à la trappe paraissant alors extrême.

1972 : le terme se popularise

Malgré plusieurs cris d’alerte de la part d’écologistes, de scientifiques et d’intellectuels, ce n’est qu’en 1972 que le premier ministre suédois de l’époque, Olof Palme évoque ce concept lors du Sommet de la Terre à Stockholm. L'écocide se popularise peu à peu. 

1998 : la première grande tentative pour criminaliser l’écocide

Depuis la création de ce terme, les plus fervents défenseurs souhaitent criminaliser l’écocide dans le droit international. Mais cela est un échec cuisant, notamment avec le « Rapport Whitaker » créé en 1985. En 1998, le statut de Rome crée la Cour pénale internationale (CPI), qui détermine les quatre crimes les plus graves :

  • les crimes de guerre ;
  • le génocide ;
  • les crimes d’agression ;
  • les crimes contre l’humanité. 

Aucune trace de l’écocide encore à ce jour.

Bon à savoir : la CPI a la capacité de traiter des atteintes graves à la nature uniquement si elles entrent dans le cadre des crimes de guerre ou des crimes contre l’humanité.

Depuis 2010, les sollicitations s’enchaînent

Nouvelle tentative infructueuse en 2010 par la juriste britannique Polly Higgins à l’origine du mouvement Eradicating ecocide. Elle demande à l’ONU de reconnaître l’écocide comme crime contre la paix.

En 2014, le mouvement End Ecocide on Earth est à la tête du projet d’initiative citoyenne européenne (ICE) pour reconnaître le crime d’écocide. Mais le manque de signatures ne permet pas de mener le projet à terme. Néanmoins, en 2014, les initiateurs de ce mouvement ont pu signer la Charte de Bruxelles, dont l’objectif est d’avoir de meilleures conditions de vie sur Terre.

Cette notion revient sur le devant de la scène en 2019 avec la menace de submersion de deux nations insulaires, le Vanuatu (Pacifique) et les Maldives (océan Indien). Tous deux réclament la reconnaissance et le jugement du crime d’écocide.

En 2019 puis en 2021, la notion d’écocide a fait l’objet de deux propositions de lois françaises, mais sans succès. En cause, la définition de ce terme manquerait de précision.

2020 : en France, la Convention citoyenne pour le Climat passe à l’attaque

L’objectif de la Convention citoyenne pour le climat (CCC) est de trouver des solutions pour réduire les émissions de CO2 d’au moins 40 % d’ici 2030 par rapport à 1990. Pour ce faire, il convient de ne pas dépasser les 9 limites planétaires pour garantir le développement de l’humanité. À ce titre, les 150 citoyens membres ont fait 149 propositions, dont celle de reconnaître le crime d’écocide.

Ils définissent l’écocide de la sorte : « Constitue un crime d'écocide, toute action ayant causé un dommage écologique grave en participant au dépassement manifeste et non négligeable des limites planétaires, commise en connaissance des conséquences qui allaient en résulter et qui ne pouvaient être ignorées ».

Afin d’assurer l’entrée en vigueur de cette loi, ils requièrent la création d’une Haute Autorité des limites planétaires et la mise en place de sanctions. À ce titre, les responsables d’atteintes massives envers l’environnement hériteraient d’une amende de 10 millions d’euros accompagnée d’une peine d’emprisonnement de 20 ans. 

Une sanction contraignante qui effraie.

En décembre 2020, la Belgique dépose une demande pour inscrire le crime d'écocide dans le droit international. Il s’agit du premier pays européen à demander officiellement la reconnaissance internationale des atteintes graves envers l’environnement.

2021 : l’élaboration d’une définition commune

En juin 2021, une nouvelle tentative est menée par un groupe d’experts spécialisés en droit pénal international et en droit de l’environnement et humains, mandatés par l’association « Stop Écocide ». 

Après six mois de recherche, ils sont parvenus à une définition juridique internationale du crime d’écocide : il s’agit « d’actes illégaux ou arbitraires commis en sachant la réelle probabilité que ces actes causent à l’environnement des dommages graves qui soient étendus ou durables ».

2021 : l'entrée de l'écocide dans le droit français

Après plus de 50 ans de lutte pour criminaliser l'écocide, celui-ci se voit enfin inscrit au Journal Officiel en 2021 dans le cadre de la loi Climat et Résilience. Mais la victoire reste amère : cette proposition a été largement revue et modifiée. Barbara Pompili, ex-ministre de la Transition écologique et Éric Dupond-Moretti, ministre de la Justice remplacent le « crime d’écocide » par le « délit d’écocide » minimisant ainsi l’atteinte la plus grave à l’environnement. 

À cela s'ajoutent deux nouvelles mesures : « le délit général de pollution » et « le délit de mise en danger de l’environnement ».

En clair : un pas en avant, deux pas en arrière. L'écocide n'est pas reconnu comme un crime, il est relégué derrière le délit général de pollution et celui de mise en danger de l'environnement, avec des sanctions s'avérant bien moindres que celles demandées par la Convention citoyenne pour le climat. De plus, la définition est bien peu claire comparée à celles proposées précédemment :

[le délit d'écocide] recouvre deux infractions distinctes qui sont le fait de commettre intentionnellement des atteintes à l'eau, à l'air, à la faune et à la flore [...] et le fait ne de pas se conformer aux règles applicables en matière de gestion des déchets, s'il en résulte des atteintes graves et durables à la santé, à la flore, à la faune ou à la qualité de l'air, du sol ou de l'eau. - Ministère de la Transition écologique et de la cohésion des territoires, 2022.

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