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Le sujet du Lean Management

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Une femme regardant un graphique affiché sur le mur
Le Lean Management est une méthode de gestion et d'organisation du travail. Mais en quoi peut-elle se révéler particulièrement intéressante ?
ESG / RSE
2024-09-02T00:00:00.000Z
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Objet de multiples ouvrages, le Lean Management n’en demeure pas moins une méthode sujette à discussion, voire même à débat. Car si ses bénéfices peuvent être réels, il en va de même de ses dérives.

Faut-il, pour autant, balayer le sujet d’un revers de main ? La réponse est non, notamment parce que le Lean Management a au moins le mérite de mettre en lumière la question du gaspillage induit par nos systèmes de production. 

Mais qu’est-ce que le Lean Management exactement ? Quels sont ses principes ?

Qu’est-ce que le Lean Management ?

Lean management, définition

Le Lean Management est une méthode de gestion et d’organisation formalisée par le Massachussets Institute of Technology (MIT) dans le courant des années 1980-1990 - par Jim Womack et Dan Jones tout particulièrement. Dérivée du seul mot “lean” qui veut dire “superflu” en anglais, cette fameuse méthode a pour but d’améliorer les performances d’une entreprise en se débarrassant simplement dudit superflu.

Dans les grandes lignes, il s’agit de mettre l’accent sur la qualité et la rentabilité de la production.

L’histoire du Lean Management

Le Lean Management n’est pas un concept nouveau. Dans la pratique, il a émergé au tournant des années 1950 au sein de l’entreprise Toyota, qui souhaitait alors couper court aux processus n’étant pas vecteurs de valeur ajoutée dans la perspective du produit final. Une démarche gagnante, car grâce à elle, l’entreprise Toyota opéra alors effectivement des progrès significatifs en termes d’efficacité.

À cette époque, on parle du “Toyota Production System” (TPS). Il faudra ainsi attendre 1988 pour que le terme “lean” fasse pour la première fois son apparition dans un article rédigé par John Krafcik : “Triumph of the Lean Production System ”. En 1996, Jim Womack et Dan Jones publieront à leur tour l’ouvrage de référence “Penser l’entreprise au plus juste” (aujourd’hui devenu “Système Lean”), qui achèvera de rendre ce modèle connu du grand public.

Les piliers et principes du Lean Management

Le nombre de piliers et principes attribuables au Lean Management diffère parfois d’une source à l’autre.

5, 7, 13, 14 principes… Chaque théoricien du Lean Management a proposé sa propre liste détaillant les X valeurs fondamentales de ce système de management. (Welcome to the Jungle, 23 mai 2017)

À titre de référence, nous présenterons ici les piliers et principes introduits par l’ouvrage Toyota Way 2001 de Fujio Cho, président de Toyota de 1999 à 2005, puis - pour être complets - nous évoquerons les cinq principes fondamentaux de la “démarche lean” identifiés par Jim Womack et Dan Jones dans leur livre “Système Lean”.

The Toyota Way 2001

Les 2 piliers du Lean Management

Avant toute autre chose, le Lean Management repose sur deux piliers fondamentaux : l’amélioration continue et le respect des individus. 

1. L’amélioration continue

L’amélioration continue est une notion centrale dans le Lean Management, et ce, pour une raison précise. Il serait faux, en effet, de penser que le Lean Management présuppose que l’on peut créer un modèle d’organisation et de gestion totalement immuable. Comme si on pouvait, un jour, établir une manière de fonctionner qui soit parfaite, et perpétuer cette dernière sans jamais avoir à l’ajuster.

Bien évidemment, ce n’est pas le cas.

2. Le respect des individus

Le respect et le travail d’équipe sont parfois peu évoqués lorsqu’on parle du Lean Management. Et pourtant : ils incarnent à eux deux le second pilier de cette méthode. De fait, pour fonctionner, cette dernière repose sur un excellent niveau de communication au sein même de l’organisation. Or, un tel niveau de communication est très peu susceptible de se produire au sein d’un environnement où règne la défiance entre les employés. Si le respect des individus est essentiel, c’est donc parce qu’il est important de créer de la confiance mutuelle, permettant à chacun de s’exprimer et d’être écouté.

Les 5 principes du Lean Management

Les deux piliers du lean management que sont l’amélioration continue et le respect des individus peuvent ensuite être déclinés en 5 principes fondateurs (cf. tableau ci-dessous).

Pilier Principe Description
Amélioration Continue Genchi Genbutsu (Aller voir sur le terrain) Il s'agit de se rendre directement sur le terrain pour observer les faits et prendre des décisions fondées sur ces observations directes plutôt que sur des suppositions ou des rapports.
Kaizen (Amélioration continue) Il s'agit d'encourager l'amélioration continue à tous les niveaux de l'organisation, en impliquant chaque employé dans ce processus de réflexion.
Challenge (Défi) Il s'agit d'accepter les défis qu'impose la recherche de l'excellence et de fixer des objectifs ambitieux, tout en soutenant les employés pour qu'ils atteignent ces objectifs.
Respect des Individus Respect Il s'agit de respecter chaque individu, en reconnaissant leurs contributions et en créant un environnement de travail qui valorise la diversité, la communication ouverte et favorise l'engagement.
Teamwork (Travail d'équipe) Il s'agit d'encourager le travail collaboratif en mettant en valeur l'esprit de coopération et de solidarité entre les membres de l'équipe.
une femme réfléchissant devant son ordinateur

Système Lean : penser l’entreprise au plus juste

Dans leur ouvrage “Système Lean”, Jim Womack et Dan Jones identifient eux aussi 5 principes fondateurs au Lean Management - lesquels diffèrent toutefois de ceux présentés plus haut.

L’identification de la valeur

La valeur constitue le point de départ de la démarche lean. Seul le client final peut définir la valeur, et celle-ci n’est significative que si elle est liée à un produit spécifique (un bien ou un service et souvent les deux à la fois), répondant aux besoins du client à tel prix, à tel moment. (Jim Womack et Dan Jones, Système Lean)

Au sens du Lean Management, la valeur d’une entreprise tient à sa capacité à apporter une réponse à la problématique de ses clients. Plus spécifiquement encore, la valeur d’une entreprise réside dans ce pour quoi ses clients sont disposés à payer en échange de son offre.

Ce premier principe est particulièrement important dans la mesure où, aujourd’hui, beaucoup d’entreprises s’efforcent d’agrémenter leur offre initiale de petits “plus”, destinés à les démarquer de leurs concurrents - du moins, en principe. 

La question qui se pose donc est de savoir si, en définitive, tous ces petits “plus” ne finissent pas par parasiter les performances de l’entreprise, en la distrayant de ce qui devrait finalement mobiliser toute son attention et son énergie.

La cartographie de la chaîne de valeur

La chaîne de valeur comprend l’ensemble des actions nécessaires pour faire franchir à un produit (un bien, un service ou, de plus en plus fréquemment, une combinaison des deux) les trois phases critiques du management lean de toute entreprise : la phase de résolution des problèmes, qui s’étend de la conception et des études détaillées à la mise en fabrication, la phase de gestion de l’information, de l’enregistrement de la commande à la programmation détaillée pour préparer la livraison, et la phase de transformation physique, de la matière première à la livraison au client. (Jim Womack et Dan Jones, Système Lean)

Une fois la valeur de l’entreprise identifiée, le Lean Management préconise de cartographier la chaîne de valeur qui lui correspond. Exit donc tout ce qui relève de services annexes ou supposés rendre l’offre de l’entreprise d’autant plus attractive. 

Pour réaliser cet exercice, seuls les éléments impliqués dans la création, la production et la livraison du produit final doivent être considérés. Plutôt efficace, un tel mapping vous permettra par ailleurs de visualiser en un coup d'œil tout ce qui relève du fameux superflu.

La création d’un flux de travail continu

Pour fonctionner, le principe du Lean Management implique un flux de travail continu. Or, dans les faits, le flux de travail est généralement interrompu du simple fait de la fragmentation des tâches. 

L’idée consiste donc à réorganiser le travail de sorte à rendre chaque employé plus polyvalent. On se concentre sur un seul produit à la fois et on synchronise les étapes de production, de sorte à prévenir tout goulot d’étranglement.

Nous faisons tous partie d’un monde basé sur des “fonctions” et des “services” ; notre bon sens nous incite à grouper les tâches par catégories afin de pouvoir les exécuter plus efficacement et les gérer plus facilement. De plus, pour accroître l’efficacité de certains services, il semble également logique d’exécuter des tâches similaires par lots. Dans une compagnie d’assurance, le service des sinistres, par exemple, traite tous les sinistres A, puis les sinistres B et enfin les sinistres C. Dans un atelier de peinture, on peint d’abord toutes les parties vertes, puis les parties rouges et les parties blanches. Or, on s’aperçoit que l'exécution par lot entraîne toujours des files d’attente pendant lesquelles le produit est immobilisé en attendant qu’arrive le moment d'exécuter l’opération suivante. (Jim Womack et Dan Jones, Système Lean)

La création d’un système de traction

Dans le cadre du Lean Management, le gaspillage des ressources est évidemment considéré comme du superflu. De fait, une offre mise à disposition pour rien a néanmoins nécessité du temps de travail, de la ressource humaine, de la ressource matérielle, etc.

Pour cette raison, le Lean Management préconise de créer “un système de traction”. Autrement dit, de tâcher de s’aligner sur la demande pour produire. 

(...) la capacité de concevoir, planifier et produire exactement ce que le client souhaite au moment précis où il le veut permet d’éliminer les prévisions de vente pour produire simplement ce que le client demande pour répondre à ses besoins. En d’autres termes, on peut laisser le client “tirer” le produit du système de production au lieu de le lui imposer alors qu’il n’en a pas réellement besoin. (Jim Womack et Dan Jones, Système Lean)

L’amélioration continue

Même une organisation ayant scrupuleusement suivi les précédentes recommandations du Lean Management peut se trouver en difficulté en raison de quantité d’aléas toutefois synonymes d’acquisition d’expérience. En outre, une entreprise n’est pas un modèle statique : ainsi, l’évolution de l’entreprise elle-même peut venir remettre en cause des schémas qui fonctionnaient très bien jusqu’alors. 

C'est la raison pour laquelle le Lean Management met l’accent sur l’importance de l’amélioration continue. Forte de l’expérience qu’elle accumule au fur et à mesure du temps et des nouveaux éléments de contexte qu’elle sait devoir prendre en compte, une entreprise (et l’ensemble de ses équipes) doit continuellement veiller à ce que son modèle fonctionne de la manière la plus optimale qui soit.

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Les bénéfices et risques

Les bénéfices du Lean Management

Si le Lean Management a rencontré un certain succès, c’est bien parce que les bénéfices à son application sont notables. 

Parmi les principaux bénéfices du lean Management, on note : 

  • une amélioration de la concentration des équipes, qui ne sont plus parasitées par des tâches et des problématiques superflues ;
  • un accroissement de l’efficacité des employés, qui peuvent se focaliser sur ce qui relève véritablement de l’essentiel ;
  • une meilleure gestion des ressources humaines et matérielles, qui ne sont plus gaspillées inutilement.

Les risques du Lean Management

Le Lean Management ne présente évidemment pas que des avantages et des adeptes. Si certains estiment que le modèle en lui-même est malsain et peut conduire à de sérieux dégâts, d’autres jugent que ce n’est pas tant le Lean Management qui pose problème que la mauvaise lecture qui en est parfois faite. 

Certains dirigeants n'en retiennent que les volets "gains de productivité" et "réduction des coûts". (Marie-Pia Ignace, présidente de l’Institut Lean France, pour le journal Les Échos, le 5 avril 2013)

L’attractivité de ces fameux gains financiers peut ainsi se révéler particulièrement néfaste. Certaines voix vont même beaucoup plus loin, estimant par exemple qu’au travers de ses méthodes, le Lean Management peut se trouver être la source de nouveaux problèmes. Parmi les plus souvent cités, les fameux troubles musculo-squelettiques créés chez les salariés travaillant à la chaîne, par l’intensification d’un travail débarrassé de toutes ses tâches annexes. 

Augmentation de la productivité par réduction des coûts et des délais et amélioration de la satisfaction au travail par développement de l'autonomie et de la participation du personnel, le Lean Management peut aussi détériorer les conditions de travail si elles sont mal mises en œuvre, appliquées de manière directive, sans concertation, par un changement brutal (...). La jouissance d'autonomie et de responsabilité au niveau de celle que l'on est capable d'assumer est ainsi de nature à améliorer la motivation et la satisfaction au travail des opérateurs dans une organisation toyotiste bien conçue, malgré un renforcement de la charge mentale par ailleurs : mais, de fait, les méthodes du Lean Manufacturing sont souvent dévoyées dans les entreprises avec une application partielle, en ne gardant que l'aspect technique et productiviste et en oubliant les aspects psychologiques, ou en les instrumentalisant. Or, tout autant que les aspects techniques, les dimensions culturelles et managériales d'une adoption du Lean Manufacturing doivent absolument être prises en compte pour assurer l'amélioration à la fois des performances et des conditions de travail. (Officiel Prévention, juin 2013)

Les outils du Lean Management

Outil Objectif Description
5S Optimisation de l'espace de travail Il s'agit d'une méthode en cinq étapes : Seiri (Trier), Seiton (Ranger), Seiso (Nettoyer), Seiketsu (Standardiser), Shitsuke (Soutenir). Le but du 5S est de créer et entretenir un environnement de travail qui soit à la fois efficace et sûr.
Kaizen Amélioration continue Il s'agit d'une philosophie d'amélioration continue, qui encourage tous les employés à identifier et mettre en œuvre de petites améliorations régulières. Chaque employé contribue ainsi à l'optimisation des processus.
Kanban Gestion des flux de production Il s'agit d'un système visuel de gestion de la production qui utilise des cartes ou d'autres signaux visuels pour gérer le flux en fonction de la demande réelle. Le Kanban permet tout particulièrement de visualiser les goulets d'étranglement et de les résoudre rapidement.
VSM (Value Stream Mapping) Cartographie de la chaîne de valeur Il s'agit d'un outil de visualisation qui cartographie chaque étape d'un processus de production, en identifiant les activités à valeur ajoutée et les gaspillages. Le VSM aide ainsi l'entreprise à repérer les améliorations critiques à apporter à son modèle.
SMED (Single Minute Exchange of Die) Réduction des temps de changement Il s'agit d'une technique visant à réduire le temps de changement des outils ou des configurations systèmes. Le SMED permet notamment de réduire les temps d’arrêt et de faciliter la production de petites séries.
Poka-Yoke Prévention des erreurs Il s'agit de dispositifs conçus pour prévenir ou détecter les erreurs humaines avant qu'elles ne se produisent. Les Poka-Yoke peuvent être des outils mécaniques, des capteurs ou même des procédures, et sont utilisés pour garantir la qualité des produits.
Andon Signalement des problèmes en temps réel Il s'agit d'un système visuel ou sonore qui permet aux opérateurs de signaler immédiatement tout problème ou anomalie sur une ligne de production.
Heijunka Lissage de la production Il s'agit d'une méthode de planification de la production qui vise à lisser les variations et les pics de la demande pour produire de manière constante et régulière. Le Heijunka permet de mieux répondre à la demande des clients en équilibrant la charge de travail et en évitant les excès de production ou les ruptures de stock.
Jidoka Autonomisation des machines et des opérateurs Il s'agit d'un principe qui donne aux machines et aux opérateurs la capacité d'arrêter automatiquement la production lorsqu'un problème est détecté.
Hoshin Kanri Alignement stratégique Il s'agit d'une méthode de gestion stratégique qui associe les objectifs de l'ensemble de l'organisation avec les actions quotidiennes conduites sur le terrain. Toutes les équipes travaillent ainsi sur des buts communs et dont la progression est mesurable.
TPM (Total Productive Maintenance) Maintenance productive totale Il s'agit d'une approche de maintenance qui vise à maximiser l'efficacité des équipements en impliquant tous les employés dans des activités de maintenance préventive et corrective. Le TPM accroît la responsabilisation de chaque employé en vue de maintenir les machines en parfait état de fonctionnement.
Gemba Walk Observation sur le terrain Il s'agit d'une pratique via laquelle les managers se rendent directement sur le lieu d'activité pour observer les processus, interagir avec les employés et identifier des opportunités d'amélioration.
quatre personnes debout autour d'une table

En quoi le Lean Management peut-il se révéler particulièrement intéressant ?

Outre l'ensemble des éléments que nous avons évoqué plus haut, le Lean Management est une méthode qui revêt un intérêt tout singulier, alors que les questions liées au gaspillage et à la surconsommation des ressources se posent aujourd'hui plus que jamais.

Qu'on adhère ou non aux principes voire au concept même du Lean Management, l'accent qui a été mis (par son biais) sur la problématique posée par le gaspillage s'avère singulièrement pertinent. Non seulement des entreprises peuvent effectivement perdre un temps, une énergie et des moyens financiers précieux faute d'une organisation optimisée, mais en plus, on sait maintenant à quel point notre production excessive de biens et de services s'avère aussi néfaste pour l'environnement.

Encore une fois : nul n'est obligé d'adhérer au Lean Management dans sa globalité. En revanche, il est indéniable que certains de ses postulats pourraient tout à fait s'inscrire dans une démarche de production davantage éco-responsable. Le fait de produire à la demande, par exemple, permet bel et bien de parer à tout problème de surproduction, et donc de gaspillage des ressources disponibles. Ceci sans même parler des émissions de gaz à effet de serre associées.

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