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Les enseignements de l'affaire "Deutsche Bank"
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Les enseignements de l'affaire "Deutsche Bank"

ESG / RSELégislations & normes
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En 2022, la Deutsche Bank a été accusée de greenwashing. Pour quelles raisons ? Quels enseignements retirer de cette mésaventure ? Détails.
ESG / RSE
2022-09-29T00:00:00.000Z
fr-fr

Fin mai 2022, la Deutsche Bank a été visée par une enquête pour greenwashing. Un signal fort adressé à l’ensemble des institutions financières, lesquelles sont appelées à contribuer activement, elles aussi, à la lutte contre le changement climatique. 

Plutôt que de s'attarder sur la Deutsche Bank, cependant, nous souhaitons mettre en lumière les mécanismes ayant amené à la mise en cause de cette institution bancaire. L'objectif : aborder cette question de façon constructive, et permettre à ceux qui le souhaitent d'évoluer en conséquence.

Qu'est-il arrivé à la Deutsche Bank ? Sur quel fondement cette enquête en greenwashing a-t-elle été ouverte ? Comment faire en sorte que ce cas de figure ne se reproduise pas ?

Explications.

L'affaire en greenwashing de la Deutsche Bank

Les faits

Le 31 mai 2022, la Deutsche Bank (DB) et sa filiale de gestion d’actifs (DWS) ont été perquisitionnées par la police allemande, suite à des suspicions de greenwashing. L’alerte avait été donnée auprès de l’Autorité fédérale de supervision financière (la BaFin) et du gendarme américain des marchés (SEC), par l’ancienne responsable du développement durable de la DWS, Desiree Fixler. 

En l'espèce, elle accusait le gestionnaire d’actifs d’avoir gonflé la taille de ses investissements ESG - Environnementaux, Sociaux et de Gouvernance. 

De quoi la Deutsche Bank a-t-elle été accusée ?

L’institution financière a été visée par une enquête pour fraude. En bref, certains de ses produits d’investissements auraient été étiquetés comme durables sur les prospectus de vente. Or, les critères ESG n’étaient manifestement pas pris en compte pour la plupart de ces produits. Autrement dit : leur durabilité ne se fondait pas sur des critères concrets.

En définitive, certains produits d'investissement étaient "vendus comme plus "verts" et "durables" qu'ils ne l'étaient en réalité" (Parquet de Francfort, 31 mai 2022 - Journal Le Monde).

Que s'est-il passé ?

Ce n'est pas à nous de le dire, mais à la Deutsche Bank. Il est à noter que la banque nie avoir trompé ses investisseurs. Le patron de la DWS, Asoka Wöhrmann, a néanmoins démissionné dans la foulée.

Dans cette affaire, la mutation rapide que connaît le monde financier a sans doute joué. Un exemple : en 2020, le rapport annuel de la DWS faisait état de portefeuilles ESG d’une valeur de 459 milliards d’euros. En 2021, ce chiffre tombait à 115 milliards d’euros d’actifs ESG. Une baisse drastique, sans doute causée par le renforcement des règles européennes sur la transparence de ces produits. Pour rappel, le 10 mars 2021 a marqué l'entrée en vigueur du règlement européen (UE) 2019/2088 sur la publication d’informations en matière de durabilité dans le secteur des services financiers.

Aussi connu sous le nom de SFDR (Sustainable Finance Disclosure), "ce règlement avait pour objectif d’harmoniser et de renforcer les obligations de transparence applicables aux acteurs qui commercialisent certains produits financiers ou qui prodiguent des conseils sur ces produits." (Revue de l’ACPR, avril 2021)

Pour ce qui est de la Deutsche Bank, il est donc probable que la virtuosité de bon nombre de ses actifs ait été surévaluée. Alors : erreur, négligence, méconnaissance ou cynisme ?

Le problème, c'est que ces produits d’investissement rapportent effectivement très gros. Selon les prévisions de Bloomberg Intelligence, d’ici 2025, l’ensemble de ces actifs devrait culminer à plus de 50 000 milliards de dollars. Une somme équivalente au tiers des actifs mondiaux sous gestion.

Qu'est-ce qu'une accusation en "greenwashing" ?

Le greenwashing est une technique frauduleuse employée dans le domaine du marketing et de la communication. Il s'agit de promouvoir une image de marque plus responsable, éthique et écologique qu'elle ne l'est en réalité.

Pour les entreprises usant du greenwashing de manière intentionnelle, le but est de donner une image de marque éco-responsable, sans avoir à opérer les efforts nécessaires pour le devenir. Il arrive toutefois que certaines entreprises fassent du greenwashing par maladresse, négligence ou encore par méconnaissance du sujet.

En France, le greenwashing est une infraction passible de deux ans d’emprisonnement et d’une amende de 300 000 euros - celle-ci pouvant être portée (de manière proportionnée aux avantages tirés du délit) à 80 % des dépenses engagées pour la réalisation de la publicité ou de la pratique coupable de greenwashing (article L.132-2 du Code de la consommation).

En outre, depuis le 1er janvier 2023 en France, le recours aux allégations de neutralité carbone est encadré par la loi. En cas d'infraction, les organisations concernées sont passibles d'une amende de 100 000 euros.

Pourquoi les sphères financière et bancaire font-elles l'objet d'une telle attention ?

D’après l’étude menée par Oxfam en octobre 2020, l’empreinte carbone des banques françaises représente huit fois les émissions de gaz à effet de serre de la France.

Sans le savoir, bon nombre de citoyens participent au financement des énergies fossiles, principaux responsables du réchauffement climatique. En effet, beaucoup de banques soutiennent l’exploitation et l’utilisation de ces énergies polluantes via l’épargne de leurs clients. Ce soutien se manifeste au travers de leurs choix de financement et d’investissement.

Or, selon le 13ème rapport Banking on Climate Chaos, en 2020, les banques françaises auraient représentés les principaux apports financiers européens des énergies fossiles. Depuis 2016, elles les auraient financées à hauteur de 350 milliards de dollars.

Pour être juste, il faut souligner que l'abandon instantané du recours aux énergies fossiles ne semble pas envisageable en l'état. Les besoins mondiaux en matière d'énergie ne rendent pas cette hypothèse crédible. Pour sortir des énergies fossiles, un système alternatif doit d'abord être créé - idéalement fondé sur le recours aux énergies renouvelables. Pour autant, la réalité du changement climatique et le rôle que les énergies fossiles jouent dans cette catastrophe nous obligent à trouver le moyen de les abandonner le plus vite possible. Et c'est là le début des tensions : pour beaucoup, les banques traînent des pieds.

D’après les analystes, au cours des 20 prochaines années, le marché des fonds ESG devrait connaître une croissance de 20 000 milliards de dollars. En somme, plus le réchauffement climatique fait irruption dans l’actualité, plus ce type d’actifs connaît du succès… 

Une aubaine financière. Mais à quel prix ? 

Ce qu'il faut retenir

C'est à la justice qu'il appartient de trancher le cas de la Deutsche Bank. Du reste, pour les autres institutions bancaires, cette affaire doit sonner comme un véritable signal : celui du changement. S'il ne fallait retenir qu'une chose de cet événement, c'est que la question de la transition écologique est devenue trop sérieuse pour prendre certaines allégations à la légère. Ou ne pas suivre de près les évolutions relatives à la transition du secteur bancaire. Ce dernier a entamé sa mue - en témoigne l'émergence progressive du modèle des banques éthiques. Libre à ceux qui le souhaitent d'entrer dans la danse. Il n'est pas trop tard.

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