Décarbonation : définition, pistes de réflexion et mise en œuvre
Pilier de la transition écologique, la décarbonation s'impose à nos sociétés, en vue notamment de réduire notre dépendance aux énergies fossiles.
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Selon la Carbon Pricing Leadership Coalition, à peine plus de 20% des émissions mondiales font l’objet d’un suivi et d’un pilotage actif. Ce n’est pas suffisant au regard de l’objectif fixé par les Accords de Paris pour limiter la hausse de la température à 1,5° degrés. A l’échelle de l’Union Européenne, l’objectif est de réduire de 55% les émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030 et atteindre la neutralité carbone en 2050.
On remarque que seuls les acteurs économiques les plus importants avaient jusqu’ici les moyens de mettre en place une stratégie bas carbone : les Etats bien sûr, avec la formalisation de Stratégies nationales bas carbone dans le cadre des Conférences Intergouvernementales (COP21, 26 etc.), et les grandes entreprises, à travers diverses initiatives, comme le Carbon Disclosure Project (CDP) ou encore l’initiative Science Based Targets.
Pour les petites et moyennes entreprises dont les moyens sont souvent plus limités et dont les activités génèrent pourtant une part non négligeable des émissions mondiales de gaz à effet de serre, peu d’outils abordables existaient jusqu’à présent.
Qu’est-ce que l’initiative Science Based target (SBTi) ?
🌱 La SBTi est un partenariat entre le CDP, le Pacte mondial des Nations unies, le World Resources Institute (WRI) et le World Wide Fund for Nature (WWF) dont le rôle est définir les meilleures pratiques en matière de réduction des émissions, et de certifier les entreprises sur leur trajectoire bas carbone et net zero conformément aux dernières données scientifiques sur le climat
Plus de 2 000 entreprises et institutions financières travaillent avec l’initiative SBT pour réduire leurs émissions, dont 1134 avec des engagements pour limiter la hausse de la température à 1,5°C.
Pour atteindre l’objectif fixé par les accords de Paris, les entreprises sont désormais mises au défi d’engager leur chaîne d’approvisionnement dans une trajectoire bas carbone afin de réduire efficacement leur empreinte carbone. Cela nécessite le déploiement de nouveaux outils de comptabilité carbone afin de généraliser la mesure et la mise en place de plans d’action de réduction à des coûts abordables. Pour les fournisseurs, l’engagement climatique doit devenir un atout compétitif.
Mesurer et comprendre les sources d’émissions d’une entreprise constitue une étape cruciale pour agir et contribuer à limiter le réchauffement climatique. Le niveau d'influence et de contrôle que chaque entreprise a sur ses émissions est classé selon trois catégories, aussi appelés “scopes”. Le scope 1 correspond aux émissions directes des sources contrôlées par l’entreprise, le scope 2 aux les émissions indirectes provenant de la production d’énergie consommée par l’entreprise et le scope 3 représente toutes les émissions indirectes qui ont lieu dans la chaîne de valeur de l’entreprise (émissions en amont liés aux achats et en aval liés aux déplacements professionnels ou à l’utilisation de produits vendus par exemple).
Jusqu'à présent, la majorité des entreprises ayant une trajectoire bas carbone ont concentré leurs efforts de réduction sur les scopes 1 et 2, sur lesquels elles ont un contrôle plus direct. Or, les émissions de scope 3 représentent la plus grande part d'émissions d'une entreprise dans la plupart des secteurs. Selon un rapport 2019 du Carbon Disclosure Project (CDP), ces émissions de la chaîne de valeur sont 5,5 fois plus importantes que les opérations directes d'une entreprise. 40 % des émissions mondiales de GES sont générées ou influencées par les entreprises par le biais de leurs achats (les biens et services achetés) et des produits qu'elles vendent (l'utilisation des produits vendus), d’après un rapport de la Science Based targets initiative.
Utiliser l’influence des entreprises au sein de leur chaîne de valeur pour décarboniser en profondeur l'économie mondiale constitue un levier considérable. Chaque entreprise en tant que maillon de cette chaîne a un rôle à jouer pour une économie plus durable.
🎯 Dans le cadre fixé par l’initiative SBT, les entreprises doivent fixer des plans d’action couvrant au moins 2/3 soit 67% des émissions de leur scope 3, conformément à la norme de comptabilité carbone internationale du GHG Protocol. Ce chiffre est élevé à 95% dans le nouveau référentiel Net Zero de l’initiative SBT. Les plans d’action peuvent être des objectifs de réduction des émissions, des objectifs d'engagement des fournisseurs ou des clients.
La quantification des émissions de scope 3 d'une entreprise est un point de départ essentiel pour une gestion efficace, cela permet l’identification des catégories les plus pertinentes dans leur chaîne de valeur.
Aujourd’hui, seulement 9 % des entreprises sont en mesure de quantifier leurs émissions de manière exhaustive selon un rapport du BCG intitulé “Use AI to Measure Emissions—Exhaustively, Accurately, and Frequently.”
Les émissions indirectes sont souvent comptées plusieurs fois par différentes entreprises, tandis que, les émissions directes d'une entreprise peuvent être les émissions en amont et/ou en aval d'autres entreprises. Il est donc difficile d’attribuer la responsabilité de ces émissions à un seul acteur. Or, la question n’est plus de savoir si telle entreprise est responsable ou non des émissions mais si elle peut agir pour réduire les émissions significatives qu’elle reporte.
✅ L’Association Bilan Carbone recommande donc que la notion de responsabilité des émissions de GES soit substituée par le potentiel d’actions de chacun à réduire les émissions.
Ce recouvrement entre les émissions de différents acteurs crée des opportunités de collaboration qui augmentent les chances de réussite, tant pour préserver le budget carbone mondial que pour atteindre les objectifs de l'entreprise.
Plus les pressions des partenaires commerciaux seront importantes, plus un fournisseur sera susceptible de s’engager lui-même dans une trajectoire bas carbone. D’après un rapport de la SBTi datant de 2018, la probabilité qu’un fournisseur s’engage si deux entreprises lui en font la demande est de 68 %, et augmente jusqu’à 76% avec la demande d’une troisième entreprise.
La résilience des chaînes d'approvisionnement et des modèles commerciaux n'a jamais été aussi essentielle. En analysant les sources d'émissions au sein de sa chaîne d'approvisionnement, les entreprises peuvent identifier les possibilités de réduire directement leurs coûts opérationnels en mettant en œuvre de meilleures pratiques d’économie de matière et d’énergie, ainsi que mitiger les risques liés à l’approvisionnement et à l’évolution réglementaire notamment en lien avec le changement climatique : hausse des prix de l’énergie, volatilité des prix des matières premières...
Travailler avec des fournisseurs engagés renforcent également la crédibilité des entreprises désireuses de différencier leurs marques par leurs ambitions environnementales. Les investisseurs, les consommateurs, les associations et les responsables politiques veulent voir les entreprises assumer la responsabilité de leur chaîne de valeur et de leurs décisions d'achat.
L’engagement des fournisseurs est donc au coeur de la politique des Achats Responsables des entreprises, et représente un levier de décarbonation fondamental.
Le scope 3 constitue pour la majorité des entreprises au moins 80% de leurs émissions. Le défi est clairement de taille. Aujourd’hui, le calcul de ces émissions est largement basé sur des facteurs d’émission moyens nationaux et des données monétaires qui sont plus faciles d’accès que des données physiques liées par exemple à l’analyse de cycle de vie des produits achetés. Pourtant, de nombreux acteurs ne prennent toujours pas ce scope en compte dans le calcul des émissions de gaz à effet.
Suivre et préciser ces émissions de manière récurrente pour mieux les adresser est un challenge qu’il faut relever. Cela permet aux entreprises d’affiner l’analyse comptable et réduire les émissions de leur chaîne de valeur en :
Concrètement, l’ensemble des postes d’achats et de dépenses de l’entreprise doit être analysé, afin d’identifier les achats les plus émissifs, et donc les postes d’achats et fournisseurs à engager en priorité.
Pour cela, l’approche peut se baser dans un premier temps sur les données financières auxquelles sont appliquées des facteurs d’émissions monétaires afin de les convertir en tonnes de CO2 équivalentes.
Dans un second temps, il s’agit d’affiner les calculs en collectant auprès des fournisseurs de l’entreprise l’ensemble de leurs émissions notamment celles des produits et prestations vendus.
Les principales options pour réduire les émissions du scope 3 par le biais des achats sont les suivantes :
Pour cela, l’évaluation et la comparaison entre les fournisseurs pour objectiver leurs engagements constitue une solution pour les entreprises qui veulent engager un grand nombre de fournisseurs et les évaluer par rapport aux meilleures pratiques.
Cette étape d’évaluation peut être basée sur la mise en place d’un questionnaire sectoriel des fournisseurs existants ou lors des appels d’offres.
Les entreprises doivent communiquer leurs attentes à leurs fournisseurs pour mettre en œuvre une stratégie d'engagement fournisseurs, et obtenir des données sur l'empreinte carbone des fournisseurs et suivre les progrès réalisés.
Comme le dit le vieil adage “on ne peut réduire que ce que l’on a mesuré”. Il est donc fondamental que le calcul de bilan GES se généralise à l’ensemble des fournisseurs. Si la plupart des grandes entreprises l’ont déjà réalisé, il n’en est pas de même pour les plus petites structures. Celles-ci doivent être accompagnées dans le calcul de leur bilan GES et la mise en place d’une stratégie bas carbone.
Prétendre faire un bilan carbone de son entreprise en ignorant la mesure réelle de 90% de ses émissions, même indirectes, c’est faire semblant de s’attaquer au réchauffement climatique, en ignorant son réel impact. Il n’est pas de politique bas carbone sérieuse qui ne s'attelle activement à la décarbonation de sa supply chain, et il n’y aura pas de lutte globale efficace pour réduire les émissions carbone sans un engagement réel des grandes entreprises vis-à-vis de leurs myriades de fournisseurs. Jusqu’ici, les grands acteurs de l’économie pouvaient prétendre que les petites entreprises n’avaient pas les moyens de faire une réelle comptabilité carbone. Ce n’est plus vrai, grâce aux développements des solutions digitales, qui constituent aujourd’hui une opportunité formidable pour accélérer la transition écologique.