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L'agroécologie regroupe un ensemble de méthodes agricoles, loin d'être nouvelles, puisqu'elles s’enracinent dans les pratiques de nos ancêtres : cultiver la terre en tenant compte de l’ensemble de son écosystème (sol, eau, biodiversité, etc.). Face aux défis contemporains, elle s'érige comme une solution : une agriculture plus raisonnée, respectueuse et résiliente.
Cet article vous explique pourquoi.
Face aux dérèglements climatiques (sécheresse, inondations, etc.), ce type d'agriculture, mal adapté aux aléas climatiques, en pâtit, et contribue à aggraver ces déséquilibres, épuisant les ressources et perturbant les écosystèmes naturels. Explications.
Après la Seconde Guerre mondiale, dans un contexte de pénurie alimentaire et d'importations massives, l’agriculture se modernise en France. Pour atteindre l’autosuffisance partielle, c’est-à-dire produire suffisamment de nourriture pour répondre aux besoins internes du pays, plusieurs techniques sont adoptées :
Ces transformations s’accompagnent d’une restructuration profonde des exploitations agricoles en France, marquée par une diminution du nombre d'exploitations et une augmentation de leur taille moyenne (INSEE, 2020). L’agriculture intensive et mécanisée s’établit petit à petit en France, sans prendre en compte les enjeux environnementaux.
NB : le carbone organique dans les sols est une matière provenant de la décomposition des plantes et des organismes vivants. Il est essentiel à la fertilité du sol, car il améliore la rétention d’eau et des nutriments. L’utilisation de produits chimiques et le labour intensif accélèrent la perte de carbone organique dans les sols, libérant du dioxyde de carbone dans l’atmosphère, aggravant l’érosion et réduisant la capacité des sols à retenir l’eau.
Enfin, socialement, l’agriculture conventionnelle se caractérise par des conditions de travail précaires, dues à la pression sur les rendements, la saisonnalité, les horaires irréguliers, ainsi qu’à l’exposition aux produits chimiques et à la dépendance à des intrants chimiques coûteux.
Ce constat est d’autant plus préjudiciable dans un contexte de changement climatique, où les catastrophes climatiques extrêmes et la raréfaction des ressources s’accentuent.
L’augmentation de la température moyenne (soit + 1,48 °C par rapport au niveau préindustriel, source : Climate Copernicus, 2023) entraîne plusieurs impacts notables sur l’agriculture en France :
Le dogme d’une agriculture intensive et rentable dans un monde aux ressources appauvries et fragilisées semble donc compromis. Comment le modèle agricole peut-il se réinventer ?
L’agroécologie, selon Pierre Rabhi, pionnier de ce mouvement, s’inspire des lois de la nature. Il prône une agriculture en harmonie avec celle-ci et l’illustre ainsi :
« Se ré-inclure dans le cycle de la Vie, en symbiose avec la terre, le végétal et l’animal n’est pas un retour en arrière mais une évidente et urgente réconciliation avec les lois irrévocables de la vie ».
Il n'existe sans doute pas de meilleure définition de l'agroécologie que celle proposée par Pierre Rabhi. Agronome, écrivain et penseur, il est reconnu pour avoir largement contribué à l'essor de cette pratique en France grâce à son association Terre & Humanisme, ainsi qu'en Afrique, sa terre d’origine.
L’association Terre & Humanisme, qu’il a fondée, précise les 12 fondamentaux de l’agroécologie :
Les 12 fondements de l'agroécologie forment un ensemble de pratiques agricoles qui vont au-delà de la pratique en elle-même, c’est une invitation à écouter, observer, comprendre les éléments naturels présents dans son environnement. Sur le plan social, il s'agit d'une agriculture plus équitable et régénératrice. C’est un appel à la sobriété heureuse, selon les mots de Pierre Rabhi, visant un mode de vie en harmonie avec la nature.
L'agroécologie améliore la résistance des cultures aux événements climatiques extrêmes, comme les sécheresses prolongées, en préservant la structure du sol et en optimisant l'utilisation de l'eau (récupération de l’eau de pluie, irrigation goutte-à-goutte, etc.).
Par exemple, la rotation des cultures, qui consiste à alterner chaque année les espèces cultivées, ainsi que la polyculture, aident à réduire les pertes de récoltes en favorisant la diversité des espèces et en limitant les effets des maladies et des ravageurs. En période d’inondations, les sols régénérés par l'agroécologie retiennent mieux l’eau, réduisant ainsi le ruissellement et la perte de nutriments essentiels à la production.
Enfin, l’agroécologie favorise l'autonomie des agriculteurs en réduisant leur dépendance aux intrants chimiques, souvent coûteux et polluants. Elle prône avant tout une économie locale dynamisée grâce aux circuits courts et renforçant ainsi la souveraineté alimentaire des communautés locales.
À partir des 12 fondamentaux de l’agroécologie, comment l’agriculture conventionnelle peut-elle converger vers des pratiques agricoles plus soutenables et résilientes ?
On entend par monoculture, un espace agricole dédié à la culture d’une seule et même espèce durant plusieurs années. Si une seule espèce est cultivée, cela entraîne un appauvrissement des espèces animales et végétales de l'écosystème. En outre, la monoculture augmente le risque d'infestation par des ravageurs et des maladies, qui, face à une monoculture, peuvent se propager rapidement et détruire des cultures entières en se nourrissant exclusivement de la même espèce.
Si l’on en revient aux pratiques vertueuses de l'agroécologie, la monoculture serait donc contraire à son principe. Il faudrait tendre plutôt vers la polyculture, qui se définit comme la culture de plusieurs espèces végétales sur une même parcelle. La diversité des cultures favorise non seulement la fertilité des sols et lutte contre l’érosion, mais elle joue également un rôle clé dans l’augmentation de la biodiversité. La culture de différentes espèces végétales crée un lieu de vie propice au développement d'une multitude d'espèces, rétablissant alors un écosystème équilibré où la faune et la flore locales trouvent refuge et nourriture.
La culture des terres agricoles, aussi appelée terres arables, doit aussi s’accompagner d’une agroforesterie adaptée. Le concept d’agroforesterie a été introduit dans les années 1970, et selon l'Association de l'Agroforesterie Française, il désigne l’ensemble de pratiques agricoles qui associent, sur une même parcelle, des arbres (sous toutes leurs formes : haies, alignements, bosquets, etc.) à une culture agricole et/ou de l’élevage.
Les arbres jouent un rôle important dans les écosystèmes : ils captent du dioxyde de carbone (CO2) et libèrent de l’oxygène. Ils régulent le cycle de l’eau, en réduisent le ruissellement et limitent l’évaporation. Ils sont un rempart naturel contre les intempéries et créent un habitat pour la biodiversité, en fournissant de l’ombre et de la nourriture.
L'agroforesterie s'intègre naturellement à l'agroécologie : ces pratiques se complètent et interagissent en synergie, renforçant ainsi la résilience des cultures.
L’agroécologie n’est pas seulement un concept moderne ; elle s’enracine dans les pratiques de nos aînés et peut facilement être mise en œuvre, que ce soit à grande échelle ou dans votre propre jardin.
Vous souhaitez mettre en pratique un projet d’agroécologie ? Sollicitez l’aide des Chambres d'Agriculture, qui accompagnent les agriculteurs dans leur transition où rapprochez-vous des Collectifs Agroécologiques (collectifs d'agriculteurs), qui fédèrent les agriculteurs porteurs de projet agroécologique.
L’agroécologie est en plein essor. En France, plus de 12 000 fermes agroécologiques existent (Source : Gouvernement, 2021). Elles adoptent diverses pratiques : engrais naturels, compostage, polyculture, utilisation d'arbres fruitiers et de haies, récupération d’eau de pluie, etc.
Concrètement, que font ces fermes pour entamer leur transition vers l’agroécologie ? Voici quelques exemples de pratiques agroécologiques :
Un exemple notable de ferme agroécologique est la Ferme du Vivant dans le Var, qui combine agroforesterie, élevage et culture diversifiée. Cette exploitation agricole située dans le Var sur 45 hectares, est un projet collaboratif qui a évolué d’une production de foin vers une ferme en agriculture biologique diversifiée. Elle combine agroforesterie (culture d’oliviers), élevage de porcs noirs de Bourdeaux, une race locale en voie de disparition, maraîchage et transformation des produits animaux. Son engagement va au-delà, avec le financement d’un pôle de recherche pour l’association “Cochon Noir de Provence” et la proposition d’agrotourisme, incluant chambres d’hôtes et séminaires.
Si vous souhaitez faire votre part du colibri, comme disait Pierre Rabhi, et pratiquer l'art de l'agroécologie à votre échelle, sachez que cela est à la portée de tous.
Que vous ayez un grand terrain ou un petit jardin, l’agroécologie peut faire partie de votre quotidien. Explications.
Si vous disposez d’un potager, il est possible de pratiquer plusieurs techniques comme la rotation des cultures, la polyculture... Pour préserver les qualités intrinsèques de votre sol, il est préférable d’utiliser des méthodes naturelles pour le traitement des espèces (cendre, savon noir, etc.), et adoptez le compostage ou le paillage pour enrichir votre sol et maintenir l'humidité.
Même sans potager, l’agroécologie trouve sa place dans votre vie de tous les jours. Par exemple, en semant des plantes mellifères ou en aménageant des refuges pour les oiseaux, vous participez à la préservation de la biodiversité et à la restauration de votre environnement.
On peut suivre une formation à l’agroécologie de manière accompagnée ou autodidacte.
Pour se former à l'agroécologie, il est recommandé de se tourner vers des organismes reconnus en France, tels que l’association Terre & Humanisme (fondée par Pierre Rabhi), la Confédération Paysanne (syndicat d'agriculteurs engagés) ou l’association Terre de liens.
L’agroécologie peut également être apprise sur les bancs de l’école grâce au programme MOOC Agroécologie proposé par l’Institut Agro de Montpellier, en partenariat avec l’Université de Montpellier. Ce MOOC offre une formation aux bases scientifiques de l'agroécologie, avec une approche interdisciplinaire qui combine des domaines tels que l’agronomie, l’écologie, l’anthropologie et les sciences du sol. Pour participer à ce programme, il suffit d’être inscrit(e) à l’université.