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Est-il vraiment possible que le tourisme durable puisse rectifier les torts infligés par le tourisme moderne ?
Le tourisme durable (appelé parfois tourisme responsable ou tourisme alternatif) est une forme de tourisme tenant pleinement compte de ses impacts économiques, sociaux et environnementaux.
Autrement dit, par définition, le tourisme durable repose sur les trois piliers du développement durable : économique, environnemental et social.
Selon l’ONU Tourisme, les principes fondateurs du tourisme durable sont les suivants :
Initialement, quatre grands types de tourisme ont vu le jour : le tourisme de loisirs, qui a émergé suite à la période des Trente Glorieuses et l'instauration des congés rémunérés. Le tourisme d'affaires, associé aux voyages professionnels, le tourisme en famille et enfin, le tourisme religieux.
Aujourd’hui, l’industrie touristique mondiale s’organise autour de quelques grandes catégories, plus ou moins distinctes. En tête de liste, le plus emblématique : le tourisme de masse, incarnation par excellence du tourisme contemporain.
Le tourisme de masse se caractérise par d’importants flux de visiteurs vers des destinations populaires, misant sur l’accessibilité et les économies d’échelle. Le tourisme d’affaires, toujours bien présent, reste centré sur les déplacements professionnels, les conférences et les événements corporatifs. Deux catégories en plein essor suivent : le tourisme culturel et patrimonial, qui valorise la découverte des héritages historiques, artistiques et des traditions locales ; et le tourisme de nature et d’aventure, qui propose des expériences immersives en milieux naturels, des safaris aux treks.
Le tourisme durable, plutôt qu'une catégorie à part, représente une approche transversale applicable à chacune de ces formes. Il introduit des principes de responsabilité environnementale, d'équité sociale et de viabilité économique dans toutes les facettes de l'expérience touristique – traversant ainsi l'ensemble du spectre touristique.
Il n'y a pas de piliers définis du tourisme durable, mais plutôt des principes de base sur lesquels il s'appuie. Ces trois éléments ne sont rien d'autre que les trois fondements du développement durable (source : ONU Tourisme). En ce qui concerne le tourisme durable, on peut donc comprendre la manière dont les principes s'appliquent :
Ces trois piliers traduisent une ambition claire : tendre vers un tourisme écoresponsable, non plus simplement comme moyen de consommation, mais comme levier de transformation.
L’industrie du tourisme, qui regroupe l’ensemble des services et productions répondant aux attentes des voyageurs, génère un impact environnemental significatif, notamment via :
Toutes les formes de tourisme influencent les sites d'une manière ou d'une autre, mais l’impact est particulièrement accentué dans le cas du tourisme récréatif. Ces habitats – souvent fragiles – ont subi les conséquences du tourisme de masse, marqué par l’arrivée simultanée et massive de visiteurs en un seul lieu. Ce phénomène entraîne une pression importante sur les écosystèmes, les infrastructures locales et les communautés hôtes.
Très souvent, l’afflux massif de visiteurs engendre une surfréquentation des lieux de visites, au point de les détériorer ou de les dénaturer. Cette pression touristique croissante pèse lourdement sur les écosystèmes, accentuant la pollution et accélérant l’épuisement des ressources naturelles.
Les emplois générés, bien que nombreux, sont fréquemment précaires, saisonniers et faiblement rémunérés. L’impact du tourisme sur la population locale se manifeste aussi par une pression croissante sur les ressources vitales, souvent détournées au profit des activités touristiques. Ce modèle a des répercussions directes : les communautés locales se voient privées de moyens essentiels à leur quotidien, tandis que la biodiversité subit les effets d'une exploitation excessive de son habitat.
Le tourisme peut avoir un impact positif, à condition de repenser certaines étapes du voyage — notamment le transport, l’hébergement, ainsi que les achats et loisirs, qui figurent parmi les principales sources de surconsommation énergétique. Repenser ces aspects, c’est aussi interroger la manière de voyager, en privilégiant des approches plus sobres, plus lentes, et en redonnant du sens à l’expérience du déplacement – parfois en acceptant simplement de ralentir.
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Au-delà de l’ode à la lenteur, le voyageur soucieux de son impact s’oriente vers des infrastructures à faible empreinte écologique, privilégie la mobilité douce et soutient des initiatives responsables de préservation de la biodiversité — souvent financées par les revenus générés par les activités touristiques. Alors, la perspective de réduire les effets négatifs du tourisme devient réellement envisageable.
Car si chaque étape du séjour, du trajet à la consommation de nourriture sur place, génère un impact environnemental, l’enjeu n’est pas de le nier, mais de le réduire au maximum.
Viser un tourisme parfaitement vertueux relève de l’idéal, voire de l’utopie, mais réduire son impact reste bel et bien possible.
Le tourisme durable se présente comme une réalité tangible mais conditionnelle, dont l'efficacité dépend d'un équilibre fragile entre bénéfices et impacts négatifs.
À son meilleur, cette approche génère des retombées économiques significatives qui soutiennent les communautés locales à travers l'emploi, la valorisation de l'artisanat et le développement d'infrastructures profitant aussi aux résidents. Parmi les avantages du tourisme sur l’environnement, on compte son potentiel à devenir un puissant levier de conservation, en finançant la protection d'espaces naturels et la préservation du patrimoine culturel.
Cependant, cette vision idéalisée se heurte souvent à des réalités complexes sur le terrain. L'absence de régulations strictes, les faiblesses institutionnelles ou la corruption peuvent transformer cette promesse en mirage.
Les émissions carbone liées aux déplacements internationaux, la pression sur les ressources locales et la hausse du coût de la vie dans les zones touristiques représentent des défis persistants. Des dérives comme la gentrification des destinations ou l'exploitation des populations vulnérables révèlent les limites du concept. Face à ces tensions, un phénomène croissant de tourismophobie émerge, illustrant le rejet de certaines formes de tourisme par les habitants.
Car au-delà des intentions, toute forme de tourisme exerce une pression, qu’elle soit environnementale, sociale ou économique, sur les territoires d’accueil.
La concrétisation du tourisme durable ne relève donc ni totalement du mythe, ni complètement de la réalité établie, mais plutôt d'un objectif en construction permanente.
Sa mise en œuvre dépend de l'engagement collectif des voyageurs, des opérateurs touristiques, des communautés locales et des autorités...
Le tourisme responsable repose sur une constellation d'acteurs, chacun jouant un rôle essentiel. Au premier rang figurent les voyageurs eux-mêmes, dont les choix conscients orientent progressivement l'offre vers des pratiques différentes et plus responsables.
Toutefois, les acteurs principaux du tourisme durable seraient avant tout ceux pour qui on attend le moins : les pouvoirs publics. Pourtant, dans de nombreux cas, le tourisme dévie de ses objectifs initiaux, en raison d’une mauvaise gouvernance locale ou d’un manque de vision à long terme.
Or, la réalité d’un tourisme responsable sur le terrain dépend étroitement de facteurs tels que la stabilité politique, le niveau d’organisation administrative, les conditions économiques et l’existence d’une réglementation efficace en matière de protection du patrimoine naturel et culturel (source : Cairn, 2013).
Ce n’est qu’à travers des politiques publiques cohérentes que peut se dessiner une nouvelle vision du tourisme. Les pouvoirs publics et les collectivités territoriales jouent un rôle central dans l’orientation de cette transition, à travers des politiques et des réglementations souvent soutenues par des ONG et des associations actives sur le terrain.
NB : En France, l’État a pris les devants avec la création du Fonds Tourisme Durable, destiné à accompagner les professionnels du secteur du tourisme dans leur transition écologique. Mis en place dans le cadre de France Relance, ce fonds vise à « faire émerger et faire grandir des projets innovants et à fort ancrage territorial dans le tourisme durable » (source : economie.gouv.fr).
Enfin, les acteurs du voyage — tour-opérateurs, hôteliers, agences spécialisées, compagnies de transport, etc. — forment un maillon essentiel de cette chaîne. En concevant des expériences adaptées aux enjeux actuels du tourisme et aux attentes des voyageurs, ils ont le pouvoir d’incarner cette transformation. Cela implique de repenser en profondeur leur fonctionnement, afin de réduire leur impact environnemental tout en maximisant leur contribution sociale positive.
Pour accompagner cette évolution et guider aussi bien les professionnels que les voyageurs vers de meilleures pratiques, des outils concrets existent : tel que l’attribution d’un label de tourisme durable.
Un label repose sur des critères précis et exigeants, conçus pour structurer l’écosystème touristique et orienter les acteurs comme les voyageurs vers des pratiques plus durables.
En France, le label "Qualité Tourisme", instauré en 2005, permettait d’identifier les établissements engagés dans une démarche de qualité, notamment en matière de tourisme durable. Ce label est désormais appelé à disparaître, progressivement remplacé par le nouveau label Destination d'Excellence, qui vise à garantir et valoriser la qualité des prestations touristiques sur l’ensemble du territoire.
Au niveau européen, il est possible de se fier au label européen EDEN - Destinations Européennes d'Excellence. Le label EDEN (European Destinations of Excellence) a été mis en place par la Commission européenne dans le but de favoriser un tourisme durable à travers l'Europe. De plus, chaque année, ce label publie une liste de destinations gagnantes en matière d'éco-responsabilité.
Au niveau mondial, le label Global Sustainable Tourism Council (GSTC) est considéré comme la référence mondiale en matière de certification du tourisme durable. Bien qu'il ne délivre pas directement de label, il établit les critères internationaux reconnus et accrédite les organismes de certification qui respectent rigoureusement ses standards. Les certifications portant le logo "GSTC Accredited" sont donc les plus crédibles à l'échelle internationale, car elles assurent que l'évaluation a été menée selon les normes les plus strictes.
Le tourisme peut contribuer aux trois piliers de la durabilité, ONU Tourisme, https://www.unwto.org/fr/code-mondial-d-ethique-du-tourisme
Journée mondiale du tourisme – Bilan des émissions de GES …, ADEME, 2024, https://www.ademe.fr/presse/communique-national/journee-mondiale-du-tourisme-bilan-des-emissions-de-ges-du-secteur-du-tourisme-en-france/
Le surtourisme : quel impact sur les villes et sur l'environnement ?, Vie publique, 2024, https://www.vie-publique.fr/eclairage/24088-le-surtourisme-quel-impact-sur-les-villes-et-sur-lenvironnement
Le « Slow tourisme » comme voie pour améliorer le sentiment de bien-être, Cairn, 2020, https://shs.cairn.info/revue-gestion-2000-2020-3-page-129?lang=fr
Le tourisme durable : un nouveau modèle de développement touristique ?, Cairn, 2013, https://shs.cairn.info/revue-internationale-et-strategique-2013-2-page-97?lang=fr
1% of people cause half of global aviation emissions – study, The Guardian, 2020, https://www.theguardian.com/business/2020/nov/17/people-cause-global-aviation-emissions-study-covid-19
Après la crise, un tourisme durable, Cairn, 2021, https://shs.cairn.info/revue-l-economie-politique-2021-3-page-8?lang=fr