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Le contexte dans lequel l'agriculture intensive a émergé
La manière dont celle-ci se caractérise et ses principaux travers
Les enjeux qui se posent quant à son abandon au profit d'un modèle plus durable
Sans elle, pas de nourriture - autant dire qu’il ne s’agit pas de sinistrer le secteur, mais de l’aider à se réformer pour passer du modèle (très décrié) de l’agriculture intensive à l’agriculture durable. Ce qui n’est pas une mince affaire - voyons pourquoi.

L’agriculture intensive est un modèle agricole caractérisé par un taux de rendement particulièrement élevé.
Imaginons deux carrés de terre d’une surface parfaitement égale. Le premier relevant de l’agriculture intensive, et l’autre non.
Plus on se tourne vers un modèle agricole “intensif”, plus le niveau de production par hectare augmente. L’arrêté du 20 septembre 1993 rappelle néanmoins que ce n’est pas parce qu’il existe une différence de production entre deux exploitations équivalentes que cela signifie automatiquement que l’une d’elles peut être taxée “d’intensive”.
Légifrance
Arrêté du 20 septembre 1993 relatif à la terminologie de l'agriculture

Aujourd’hui, l’agriculture intensive est très décriée — à juste titre. Mais pour que notre système agricole (et alimentaire) évolue dans le bon sens, il est absolument crucial de se souvenir pourquoi l’agriculture intensive a émergé au tout début. Et pourquoi, en dépit de ses multiples inconvénients, elle continue à exister.
L’agriculture intensive est le modèle agricole qui a émergé au sein des pays développés au sortir de la Seconde Guerre mondiale. À cette époque, beaucoup de pays ayant été impliqués dans le conflit étaient totalement ravagés, et une grande partie de la population avait cruellement souffert de la faim.
CNA
Conseil National de l'Alimentation
Une urgence, donc : produire des denrées alimentaires en grande quantité et le plus vite possible. Un objectif qui, à l’époque, s’est vu soutenu par les rapides progrès de la mécanisation - une "aubaine" d'autant plus exploitée que la guerre étant passée par là, on tendait alors à manquer de bras.
Lumni
10 juillet 2024
Il est évident que l’agriculture intensive n’a pas continuellement concouru à des objectifs aussi louables que la reconstruction d'après-guerre ou la lutte contre la faim dans le monde. Le fait est, cependant, qu'elle a bel et bien contribué au second.
Vaclav Smil, dans "Comment marche vraiment le monde" (Editions Cassini)
Chercheur spécialiste de l'énergie et du climat
Vaclav Smil, dans "Comment marche vraiment le monde" (Editions Cassini)
Chercheur spécialiste de l'énergie et du climat
L’agriculture intensive repose sur trois grands piliers :
Si ces 3 piliers sont un bon résumé des “principes” fondateurs de l’agriculture intensive, il est essentiel de rappeler à nouveau que cette dernière n’aurait jamais pu émerger sans une exploitation massive des énergies fossiles.
Vaclav Smil, dans "Comment marche vraiment le monde" (Editions Cassini)
Chercheur spécialiste de l'énergie et du climat
Et ce n’est qu’un aperçu de la manière dont le pétrole, le gaz et le charbon sous-tendent le modèle de l’agriculture intensive. Ce qui est tout sauf un détail, dans la mesure où nous savons que nous allons devoir abandonner progressivement le recours à ce type d’énergie.
L’agriculture intensive et productiviste sont deux manières de désigner le même modèle agricole : un modèle résolument axé sur l’optimisation de sa production.

Nous l’avons évoqué plus haut : l’agriculture intensive a eu pour principal (et notable) bénéfice de contribuer à réduire la faim dans le monde, en nous permettant de produire avec une constance et à des niveaux que nous n’avions jamais connus auparavant.
C’est d’ailleurs, en substance, l’une des principales problématiques qui se posent au développement d’un modèle agricole non-intensif : un tel modèle serait-il en mesure, par exemple, de nourrir les quelques 9,2 milliards d’êtres humains que nous serons sur Terre en 2050 ?
C’est une question légitime dans la mesure où :
Mais pour commencer, il est important de souligner que lutter contre la faim dans le monde n’implique pas nécessairement de produire toujours plus - même si, factuellement, plus nous sommes nombreux.ses, plus nous avons besoin de nourriture, c’est évident.
Le problème de la faim dans le monde revêt en réalité trois facettes :
UN Environment Program
13 juillet 2020

Que l’on adhère ou non à ce constat, il est indéniable que la question du gaspillage alimentaire se pose et de manière pressante.
UN Environment Program
13 juillet 2020
Si nous ne tâchons pas d’abord d’apprendre à mieux distribuer et consommer ce qui est d’ores et déjà produit, continuer à accroître notre production risquerait simplement de conduire à encore davantage de gaspillage.
Autre question d’importance : les conséquences de l’agriculture intensive sur cette fameuse production alimentaire. Car l’agriculture intensive permet bel et bien de booster les rendements à court et moyen terme… Mais à quel prix ? Celui de la fertilité des sols.
Elodie Regnier
Rédactrice pour l’INRAE (Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement)
Or, des sols moins fertiles conduisent à des rendements moindres sur le long terme. Le jeu en vaut-il donc vraiment la chandelle ?
Pas sûr. D’autant plus que le modèle de l’agriculture intensive est un modèle très dépendant et donc finalement très vulnérable, lui aussi. Les ressources indispensables au fonctionnement de l’agriculture intensive sont des ressources dont nombre d’entre elles seront mises sous pression dans les années à venir (du fait du changement climatique mais pas que).
C’est de ce phénomène dont on parle lorsqu’on évoque “l’épuisement des sols”, qui correspond à la perte des matériaux et éléments nutritifs naturellement présents dans ces fameux sols. L'agriculture intensive n’est cependant pas la seule coupable ici : l'urbanisation ou la déforestation jouent également (et ce ne sont que des exemples).
Rappelons que le principe central de l’agriculture dite “durable” est justement de satisfaire les besoins alimentaires de notre société, sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs. Pour en savoir plus, n’hésitez pas à consulter notre article à ce sujet.

En dépit de la puissance de ses rendements, il n’apparaît pas souhaitable de perpétuer le modèle de l‘agriculture intensive, et ce, pour un tas de raisons :
Et même si nous faisions abstraction de tout ça, il est simplement déraisonnable de penser que ce modèle puisse être perpétué, compte tenu du fait que l’exploitation des énergies fossiles va devenir de plus en plus compliquée. Quand bien même nous tenterions de les remplacer par les énergies renouvelables, ces dernières ne seront jamais en mesure de soutenir un modèle d’exploitation aussi énergivore (dans une société déjà très énergivore dans son ensemble, et encore plus avec le boom de l’intelligence artificielle).
Dans ce contexte, la transition de notre modèle agricole vers l’agriculture durable semble plus ou moins inéluctable.
Cela étant dit, une transition réussie vers le modèle de l’agriculture durable impliquera un travail de titan et de très grandes mutations : tant au niveau du système agricole lui-même, que des populations. Il faut en avoir conscience.
Vaclav Smil, dans "Comment marche vraiment le monde" (Editions Cassini)
Chercheur spécialiste de l'énergie et du climat
Nous ne soulignons pas ce point pour décourager qui que ce soit, mais pour insister sur l’importance d’adopter une vision extrêmement pragmatique du problème. L’alimentation est un sujet de première importance pour notre société et pour son avenir. Nous subissons aujourd’hui collectivement les dégâts de l’agriculture intensive, mais nous subirons aussi collectivement les dégâts d’une transition mal menée car mal préparée aux questions importantes que soulève notre évolution vers un modèle plus durable (et il n’y en a là qu’un échantillon).
L’agriculture raisonnée et l’agriculture biologique sont indéniablement des pistes d’avenir qui doivent être soutenues, mais il faut être conscients de ce qu’elles impliquent également - a fortiori si nous nous obstinons à maintenir nos niveaux de consommation actuels…
Comparé à l’agriculture intensive, l’agriculture extensive est un système agricole qui consomme moins de facteurs de production par unité de surface. C’est la raison pour laquelle elle est généralement considérée comme un modèle plus “soutenable”, en ce sens qu’elle cherche à ne pas épuiser chaque hectare de terre. En contrepartie, l’agriculture extensive (comme son l’indique) se pratique sur un terrain généralement beaucoup plus étendu, pour parvenir à produire en quantité suffisante.
L’agriculture intensive a pour principal avantage d’optimiser la production agricole sur une surface délimitée (et parfois limitée), et “d’assurer” ainsi de hauts rendements (même si ce constat peut être discutable à long terme, du fait de l’épuisement des sols). Ses inconvénients sont cependant nombreux : pollution, dégradation des sols, contribution au réchauffement climatique, élevage à taille industrielle pouvant entraîner de la maltraitance animale, moindre qualité des aliments ingérés par le ou la consommateur.rice finale, etc.