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L’ère du simple alignement entre quelques grandes normes est révolue. Face à la prolifération des régulations, Emmanuel Faber, président de l’ISSB, plaide pour une simplification du reporting comptable. C’est dans cette logique qu’a été créée l’ISSB et, avec lui, les normes IFRS S1 et S2, offrant un cadre commun aux entreprises et aux marchés financiers.
Mais alors que la CSRD entre en scène en Europe, quelle place pour ce nouveau référentiel dans l’écosystème foisonnant des normes ?
Les marchés financiers ont tranché : les données ESG, fondées sur des preuves, cohérentes et comparables, font cruellement défaut pour prendre des décisions éclairées. Au fil des années, plusieurs cadres et normes ont cherché à améliorer la transparence des objectifs climatiques (source : Ecoact, 2024).
Pour pallier ce manque de transparence dans le reporting extra-financier, la Fondation IFRS (International Financial Reporting Standards) a créé en 2021 l’ISSB (International Sustainability Standards Board). Cet organisme international est chargé d’élaborer des normes harmonisées sur la performance extra-financière des entreprises, destinées aux marchés financiers.
Son objectif est de fournir aux acteurs financiers des informations comparables, fiables et compréhensibles sur les risques et opportunités liés aux enjeux environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG). En s’appuyant sur les cadres existants – Integrated Reporting, CDSB, SASB et TCFD –, l’ISSB les a consolidés et enrichis pour élaborer ses propres normes de reporting extra-financier !
L'IFRS, ou International Financial Reporting Standards, est le référentiel comptable international en vigueur. Son objectif est d'harmoniser la présentation des comptes et des performances financières des entreprises à l’échelle mondiale. Créée en 2001 par la Fondation IFRS, celle-ci a également fondé l’ISSB en 2021.
La Fondation IFRS est une organisation d’intérêt public créée pour développer des normes comptables de haute qualité, compréhensibles, applicables et acceptées à l’échelle internationale. En 2021, elle a fondé l’ISSB (International Sustainability Standards Board), avec pour mission d’établir un cadre harmonisé pour la publication d’informations financières liées à la durabilité.
NB : L’ISSB est une initiative soutenue par des instances internationales telles que le G7, le G20 et le Financial Stability Board (FSB), et bénéficie aujourd’hui d’un large appui à l’échelle mondiale. De plus, il collabore avec des organismes de régulation comme l’IOSCO ainsi qu’avec des juridictions majeures (UE, États-Unis, Chine, Japon) pour favoriser l’adoption de ses normes. Enfin, l’ISSB travaille avec la Global Reporting Initiative (GRI) afin de répondre aux attentes des investisseurs tout en prenant en compte celles des autres parties prenantes.
Dans cette logique, l’ISSB a dévoilé en juin 2023 deux nouvelles normes, IFRS S1 et IFRS S2, qui sont officiellement entrées en vigueur en janvier 2024. Ces nouveaux standards visent à fournir aux acteurs de marchés financiers des informations comparables et fiables sur l’impact des risques et opportunités liés au climat, notamment, sur la performance de l’entreprise.
En pratique, une entreprise qui applique le standard IFRS S1 est tenue d'appliquer le standard IFRS S2.
L’IFRS S1, première norme de l’ISSB, fixe un cadre global – visant à améliorer la transparence du reporting des entreprises sur l’impact des risques et opportunités du climat sur leur performance.
Cette norme impose l’intégration des informations extra-financières aux états financiers classiques, en s’alignant sur l’architecture du TCFD (gouvernance, stratégie, gestion des risques, indicateurs et objectifs).
L'IFRS S1 établit donc un cadre structuré pour la divulgation des risques et opportunités liés à la durabilité, y compris le climat, afin d'assurer une information claire et comparable pour les investisseurs.
L’IFRS S2 établit les exigences permettant aux entreprises de divulguer leurs risques et opportunités liés au climat, en mettant l’accent sur leur impact financier et leur intégration dans la stratégie de l’entreprise. Cette norme s’appuie sur les exigences définies dans l’IFRS S1 (source : IFRS, 2023).
L’IFRS S2 est une norme qui oblige les entreprises à publier, en même temps que leurs résultats financiers, des informations sur les risques et opportunités liés à la durabilité (comme le climat, la gestion des ressources, etc.).
Elle repose sur un principe clé : la matérialité financière. Autrement dit, seules les informations ayant un impact potentiel sur la rentabilité d’une entreprise, ses flux de trésorerie ou son coût du capital sont jugées pertinentes. Ce choix exclut de fait une approche plus large de la responsabilité environnementale et sociale de l’entreprise (IFRS, 2023).
Ancien PDG de Danone, Emmanuel Faber est désormais aux commandes de l’International Sustainability Standards Board (ISSB), depuis 2021. Fort de son expérience en tant que directeur financier et directeur général de Danone, il ambitionne de révolutionner la comptabilité carbone en instaurant un langage universel pour mesurer les impacts environnementaux des entreprises.
À la tête de l’ISSB, Emmanuel Faber veut en finir avec la prolifération des critères ESG, trop souvent laissés au bon vouloir des entreprises. Il plaide pour un cadre harmonisé, avec quelques indicateurs communs – le tout aligné sur les marchés financiers.
De par son expérience, il entend donc propulser des normes comparables, à la fois adaptées aux besoins des entreprises et compréhensibles pour les investisseurs – afin de mobiliser davantage de capitaux afin d’accélérer la transition écologique.
Grâce à un langage commun, les acteurs financiers pourraient prendre de meilleures décisions et orienter les fonds nécessaires à la transition. À noter que ces normes sont encore en cours d’homologation et ne sont pas obligatoires pour les entreprises.
Cependant, dans un paysage déjà marqué par une prolifération de normes, l’ajout d’un nouveau cadre soulève une question : apportera-t-il une réelle évolution ou ne fera-t-il que s’ajouter à l’existant – sans pour autant infléchir la quête de rentabilité des actionnaires ?
La principale critique adressée à l’ISSB est qu’il adopte une approche centrée sur la valorisation du capital pour les actionnaires et tend à diminuer la responsabilité environnementale des entreprises.
Un autre point d’ombre concerne la manière dont l’ISSB appréhende les impacts des entreprises sur le climat. Là ou la CSRD introduit le principe de double matérialité, l’ISSB adopte une vision centrée sur la matérialité financière. Autrement dit, elle se focalise uniquement sur les risques et opportunités que ces enjeux représentent pour la performance économique des entreprises. Comme l’explique Alexandre Rambaud, enseignant-chercheur spécialisé en comptabilité financière et écologique :
En ce sens, la nature – et en particulier le climat – n’est envisagée qu’au prisme de son impact sur la performance financière des entreprises, et donc sur la valeur actionnariale. En d’autres termes, une pollution, une atteinte à la biodiversité ou des pratiques sociales discutables ne seraient considérées problématiques que si elles représentent un risque financier.
L’entreprise n’a ainsi aucune responsabilité explicite vis-à-vis de l’environnement. De plus, aucun autre enjeu écologique, comme la biodiversité, n’est pris en compte. En réduisant la nature à un simple facteur de risque financier, l’ISSB pourrait ainsi limiter la portée de la responsabilité des entreprises sur leur impact environnemental.
Si Emmanuel Faber assure que tous les impacts, y compris le scope 3, seront pris en compte, une limite fondamentale subsiste (source : Emmanuel Faber, France Inter, 2024). La réduction de l’impact carbone d’une entreprise ne deviendra une priorité que si elle influe directement sur la rentabilité ou la perception des investisseurs.
Dès lors, l’impératif environnemental risque d’être relégué au second plan, éclipsé par les exigences des marchés financiers.
An introduction to ISSB’s new International Sustainability Disclosure Standards (IFRS SDS), Ecoact, 2024, https://eco-act.com/blog/issb-disclosure-standards/
Histoire et déboires possibles des normes comptables internationales, Cairn, 2007, https://shs.cairn.info/revue-l-economie-politique-2007-4-page-92?lang=fr
Emmanuel Faber, président de l'ISSB, est l'invité de "On n'arrête pas l'éco", Emmanuel Faber, France Inter, 2024, https://www.youtube.com/watch?v=9DJssOxgiOM
Si l'International Sustainability Standards Board (ISSB), présidé par Emmanuel Faber gagne, l’Europe perdra de son poids dans l’économie du futur, Alexandre Rambaud, LinkedIn, 2023, https://www.linkedin.com/pulse/si-linternational-sustainability-standards-board-issb-rambaud/
L'ISSB s'attaque au capital humain et à la biodiversité... mais toujours pas aux intérêts financiers non durables, Novethic, 2024,
https://www.novethic.fr/economie-et-social/transformation-de-leconomie/issb-interets-financiers-peu-durables-capital-humain-biodiversite
L’ISSB publie ses deux premières normes de durabilité, S1 et S2, Lefebvre Dalloz, 2023, https://formation.lefebvre-dalloz.fr/actualite/lissb-publie-ses-deux-premieres-normes-de-durabilite-s1-et-s2
An in-depth explainer: IFRS S1 General Requirements for Disclosure of Sustainability-related Financial Information, IFRS, 2023, https://www.ifrs.org/content/ifrs/home/supporting-implementation/supporting-materials-for-ifrs-sustainability-disclosure-standards/ifrs-s1/an-in-depth-explainer-ifrs-s1.html