Empreinte carbone : avion vs voiture, le match
L'avion et la voiture sont des modes de transport polluants. Mais l'une de ces options tire-t-elle malgré tout son épingle du jeu ?
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Dans les tuyaux depuis déjà 25 ans, l’accord UE-Mercosur n’a décidément rien d’une promenade de santé : finalement signé il y a 5 ans, sa ratification définitive traîne et fait désormais l’objet d’une querelle entre les États membres de l’Union européenne. Aux avant-postes de la gronde, la France voit d’ailleurs ses propres agriculteurs manifester contre cet accord de libre-échange avec une partie de l'Amérique latine (après une première crise survenue au mois de janvier).
Et pourtant : si d’autres pays expriment leurs réticences, force est de constater que ce sentiment est loin de faire l’unanimité sur le Vieux Continent.
Mais qu’est-ce que l’accord UE-Mercosur et quels sont ses objectifs ? Pourquoi suscite-t-il autant de controverses ? Au-delà de simples tractations commerciales, quelles sont ses implications géopolitiques ?
Tour d’horizon.
L’accord UE-Mercosur est un accord de libre-échange. Pour rappel, le libre-échange est le modèle qui s’oppose au protectionnisme. Conformément à la définition du Larousse, le libre-échange est donc un “système économique dans lequel aucun obstacle douanier, fiscal ou réglementaire ne vient freiner les échanges commerciaux entre États (...)”.
En l’espèce, le Mercosur constitue d’ores et déjà “un espace de libre circulation des biens et des services en Amérique latine”. Cinq pays font partie de cet espace : l’Argentine, le Brésil, le Paraguay, l’Uruguay et la Bolivie.
NB : le Mercosur a été institué par le traité d’Asunción, signé le 26 mars 1991. Il représente plus de 80 % du PIB sud-américain.
Loin d’être anecdotique, l’hypothétique accord UE-Mercosur concernerait quant à lui plus de 750 millions de consommateurs et viendrait compter pour un cinquième de l’économie mondiale.
Signé le 28 juin 2019, ce texte n’a cependant jamais passé les dernières étapes de la ratification.
NB : attention à ne pas confondre signature et ratification. Comme le précise le glossaire des Nations Unies, une signature sous réserve de ratification (comme c'est le cas ici) "n'établit pas le consentement à être lié. Elle constitue cependant un moyen d'authentifier le traité et exprime la volonté de l'État signataire de poursuivre la procédure dont le but est la conclusion du traité. La signature donne à l'État signataire qualité pour ratifier, accepter ou approuver". A contrario, la ratification "désigne l'acte international par lequel un État indique son consentement à être lié par un traité".
Les objectifs de l’accord UE-Mercosur peuvent être synthétisés en deux catégories : les objectifs économiques d’un côté, et les objectifs stratégiques de l’autre.
L’un des principaux objectifs de l’accord UE-Mercosur est d’accroître les flux commerciaux entre les deux blocs. Il est à noter qu’en vérité, l’Union européenne est déjà le deuxième partenaire commercial du Mercosur - juste derrière la Chine. En 2019, le journal Le Parisien rapportait que l’UE et le Mercosur échangeaient 88 milliards d’euros de biens par an. Du côté des services, la Commission européenne estimait, à cette même époque, que le montant de ces échanges annuels s'élevait à 34 milliards d’euros.
L’accord UE-Mercosur prévoit une suppression progressive des droits de douane sur :
Or, une telle réduction des barrières tarifaires pourrait générer un gain économique de 4 milliards d’euros pour les entreprises européennes.
D’un côté comme de l’autre, l’accord UE-Mercosur présente un attrait non-négligeable au regard des caractéristiques des marchés auxquels chacune des parties pourrait avoir plus facilement accès.
Pour les entreprises européennes, par exemple, le Mercosur représente un véritable concentré de marchés en pleine expansion. Pour les entreprises sud-américaines, le marché européen attire de par son potentiel accru en termes de pouvoir d’achat.
Enfin, l’accord UE-Mercosur permettrait aux deux blocs concernés de diversifier les exportations et les importations sur différentes catégories de produits. Un aspect devenu essentiel pour de nombreux États, depuis que la pandémie de Covid-19 et la guerre en Ukraine ont mis en exergue les risques associés à la dépendance vis-à-vis d’une source d’approvisionnement unique.
En dépit des avantages promus par les soutiens de l’accord UE-Mercosur, ce dernier est loin de faire l’unanimité. En France, il suscite même un rejet relativement majeur. Mais pourquoi donc ?
L’une des principales critiques adressées à l’accord tient à la question environnementale. D’une part, beaucoup craignent que la signature d’un tel accord encourage l’expansion des terres cultivables au détriment des forêts tropicales en Amérique du Sud. Or, les forêts tropicales incarnent non seulement des écosystèmes précieux, mais elles sont aussi de puissants puits de carbone dont nous avons plus que jamais besoin dans le cadre de la réduction de nos émissions de gaz à effet de serre.
Dans l’absolu, l’accord UE-Mercosur ne fait pas l’impasse sur l’Accord de Paris - lequel a établi la limite de + 1,5 °C (voire 2 °C) de réchauffement à l’échelle mondiale. Bien au contraire.
Ceci étant dit, on peut légitimement se demander si cette mention constitue une quelconque garantie. Car en l’état actuel des engagements pris par nos États, et en dépit de la signature de l’Accord de Paris en 2015, notre planète se dirigerait actuellement vers un réchauffement de 3,1 ° C à la fin du siècle… Loin de la limite fixée, donc.
Autre point de crispation : les exigences environnementales traditionnellement appliquées au sein de l'Amérique latine, qui sont moins sévères que celles de l’UE. Outre la question d’une lutte déloyale entre les acteurs des deux blocs, certains redoutent que l’accord UE-Mercosur viennent soutenir des productions se donnant moins de mal que d’autres, en vue d’évoluer vers des modèles plus vertueux. Sans parler du fait qu’en Amérique Latine, la main-d'œuvre est aussi beaucoup moins chère.
Enfin, nombre de gens s’inquiètent de voir un tel accord ratifié et donc venir encourager encore davantage les échanges avec un partenaire aussi éloigné géographiquement parlant. De fait, la distance entre les deux blocs induit de facto une empreinte carbone considérable, rien que pour acheminer les marchandises d’un point à l’autre. À une époque où nous devrions, aussi souvent que possible, privilégier une offre locale.
Sur le volet sanitaire, l’accord UE-Mercosur pose question sur le respect des normes établies en Europe. Là encore, les produits agricoles sud-américains étant soumis à des réglementations moins strictes en matière d’utilisation de pesticides et d’antibiotiques par exemple, beaucoup expriment leur inquiétude quant à la qualité des produits qui pourraient être importés au sein de l’UE.
Il faut toutefois noter qu’en 2019, le site de la Commission européenne indiquait clairement qu’il n’était pas question de revoir les normes de l’UE à la baisse.
Une position plutôt rassurante donc, mais qui pourrait se heurter à de réels obstacles dans la pratique.
Preuve en est : en novembre 2024, le Brésil a suspendu ses exportations de viande de génisse vers l'UE, suite aux résultats d’un audit européen réalisé au printemps et ayant abouti à la découverte de défaillances dans le contrôle qualité et la traçabilité de certaines hormones.
Quid des clauses miroirs proposées par la France ? Une utopie, selon l’économiste Charlotte Emlinger, interrogée par Public Sénat.
Pour l’Union européenne, l’accord avec le Mercosur est aussi une façon de renforcer son influence en Amérique latine - une région convoitée par les États-Unis et la Chine, en raison de ses réserves de lithium.
Le lithium est aussi un élément essentiel dans le domaine des énergies solaire et éolienne.
En établissant un partenariat privilégié avec le Mercosur, l’Europe espère ainsi renforcer ses relations avec l’Amérique du Sud par le biais d’une alliance économique puissante.
Non pas qu’il n’existe pas de lithium en Europe, loin s’en faut. Une mine découverte en Serbie fait d’ailleurs l’objet de beaucoup de convoitise... Même si, pour l’heure, une part importante de la population est opposée à cette extraction, le projet a a priori été validé en juillet 2024 par le gouvernement serbe.
Ironiquement, l’exploitation de ce précieux matériau qui pourrait nous aider dans notre transition peut aussi, malheureusement, avoir des conséquences en termes de pollution - d’où l’opposition des Serbes. En France, là où une mine de lithium vient d’être découverte dans l’Allier, un débat public a été organisé entre mars et juillet 2024.
Alors que faire pour assurer l’indépendance de l’UE ? Depuis la pandémie de Covid-19, le début du conflit russo-ukrainien, et face à la politique de plus en plus agressive de la Chine, l’Union européenne a pris conscience de la fragilité de ses chaînes d’approvisionnement en matières premières (dans de nombreux domaines). D’où sa volonté de pouvoir compter sur elle-même, au moins jusqu’à un certain point.
Après quoi (et notamment si certaines populations s’opposent à l’extraction du lithium disponible en Europe), le club de 27 doit chercher des solutions ailleurs, afin de diversifier ses approvisionnements. Car la transition écologique de l’ensemble des États membres implique de solides ressources. Toujours selon le Parlement européen, "d’ici 2050, la demande de lithium de l’UE pourrait être jusqu’à 21 fois supérieure à celle de 2020".