ESG / RSE
Secteurs d'activité



Les principales menaces pesant sur le monde du spectacle
Les défis à relever
Les 5 leviers qui pourraient permettre d'améliorer la performance environnementale de ces événements
En 2023, le décès d’une spectatrice de Taylor Swift avait illustré l'une des facettes les plus tragiques de l'impact du changement climatique sur le spectacle vivant. Âgée de seulement 23 ans, la jeune femme avait succombé à un “épuisement thermique dû à une exposition diffuse à la chaleur". Le jour du concert en question, la température à Rio de Janeiro avoisinait les 60 °C.
Alors, comment soutenir la transition écologique du spectacle vivant ? Quels sont les défis majeurs ? Les solutions qui peuvent être envisagées ? Greenly vous répond.
Le 6 juillet 2025, en France, le Ministère de la Culture a annoncé que l'État allait verser 6 millions d'euros supplémentaires au secteur du spectacle vivant et des arts visuels pour les aider à faire face "aux défis sociétaux, économiques et environnementaux" et renforcer la mise en œuvre du plan "Mieux produire, mieux diffuser" - déjà doté de plus de 22 millions d'euros.
Le spectacle vivant désigne toute représentation artistique donnée en direct, devant un public, avec des artistes présents physiquement sur scène.
On parle d'une rencontre en temps réel entre les artistes et les spectateurs. Pour le spectacle vivant - contrairement au cinéma ou à la télévision - rien n’est enregistré à l’avance.
Le secteur du spectacle vivant étant très vaste, nous avons choisi de nous concentrer sur les problématiques qui reviennent le plus souvent et pour beaucoup des activités concernées (isolation, transport, matériel, déchets...). Cela ne signifie pas que ces questions se posent systématiquement, que d'autres ne peuvent pas émerger en fonction des cas, ou que les pistes d'amélioration qui seront proposées conviendront parfaitement à chacun(e). Si vous avez besoin d'une aide répondant parfaitement à vos contraintes spécifiques, nous vous invitons bien évidemment à nous contacter directement.
Les conditions climatiques extrêmes affectent d’ores et déjà le spectacle vivant.
Au total, les festivaliers sont demeurés bloqués sur place 3 jours durant, et une personne est hélas décédée.
Les infrastructures accueillant les concerts ou les représentations théâtrales ont, pour beaucoup d’entre elles si ce n’est la majorité, été construites à une époque où le changement climatique ne faisait pas la une des médias.
Elles n’ont donc pas été conçues pour résister aux aléas de ce type, ou pour garantir en toute circonstance le confort des artistes et des spectateurs.
Les professionnels du milieu tâchent de trouver des solutions. Le livret proposé par le Syndéac en 2023 l’illustrait d’ailleurs parfaitement.
Problème : revoir les pratiques est souvent synonyme de coûts. L’adoption de certaines technologies (à l’image de systèmes de refroidissement davantage performants) implique de consentir à des investissements importants.
Or, cette équation peut s’avérer complexe pour les professionnels qui ne disposent pas des ressources financières suffisantes.

Il est probable que le secteur du spectacle vivant se voit progressivement imposer de nouveaux genres de réglementation, à l’image de ce qui se fait dans d’autres secteurs d’activité.
Idéalement, mieux vaudrait donc ne pas attendre de se trouver collé(e)s au pied du mur, car la transition écologique d’une organisation ne s’opère jamais en un claquement de doigts.
Une réglementation statuant sur des objectifs à atteindre dans un délai imparti est souvent source de stress pour les entreprises, qui peuvent soudainement se sentir prises à la gorge.
Pour peu qu’elles aient d’autres préoccupations à ce moment précis, le sujet de la transition tourne au cauchemar.
Nous sommes de plus en plus sensibilisé(e)s au changement climatique et à l’importance de modifier nos habitudes. Pour cette raison, le public prenant part aux manifestations du spectacle vivant escompte lui aussi, de plus en plus, que les organisateurs contribuent à l’effort collectif.
Dans ce contexte, l’enjeu revêt aussi une dimension économique. Si le secteur souhaite demeurer attractif, il se doit de prendre en compte les préoccupations des individus qu’il espère voir venir assister à ses évènements.

| Défi | Description | Impact environnemental |
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1. Le transport et la logistique
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Le transport et la logistique sont absolument centraux dans le cadre de l’organisation des festivals ou des tournées. Qu’il s’agisse des artistes, des équipes techniques ou du public, tout ce beau monde (et le matériel) doit être acheminé jusqu’au lieu du spectacle — ce qui pose souvent problème. Les solutions choisies ne sont, dans bien des cas, pas les plus écologiques. | Selon Impact CO2, le transport imputable aux évènements culturels peut représenter 60 à 80 % des émissions de ces derniers. |
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2. La consommation d’énergie
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Chauffage, climatisation, éclairage, sonorisation, écrans… Les dispositifs techniques nécessaires à un spectacle sont souvent légion. Par ailleurs, les infrastructures d’accueil sont rarement bien isolées, ce qui accentue encore les besoins en chauffage l’hiver et en climatisation l’été. | Une consommation importante d’énergie, due aux équipements déployés et à l’isolation souvent insuffisante des lieux. |
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3. La gestion des déchets
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Une grande quantité de déchets est générée, en particulier lors des festivals. Cela va bien au-delà des consommables classiques (gobelets, flyers, emballages alimentaires). Des éléments de scénographie ou de costumes peuvent aussi finir à la benne, car ils ne servent qu’une seule fois. | Volume élevé de déchets peu valorisés, souvent issus de matériaux à usage unique ou difficilement recyclables. |
Les chiffres avancés par des études globales (portant sur l'ensemble d'un secteur) doivent toujours être considérés pour ce qu'ils sont, c'est-à-dire des estimations. La répartition de l'impact environnemental d'un événement peut varier significativement - en fonction du pays où il se déroule, par exemple. En France, l'électricité émanant en grande partie du nucléaire, elle sera moins émissive que dans d'autres pays. Pour cette raison, il est important de traiter le sujet au cas par cas et de ne pas verser trop facilement dans la généralisation.

À l’aune de ce qui vient d’être mentionné, on comprend sans mal que la transition du spectacle vivant reposera sur une action conjointe des artistes et du public... ou ne se fera pas.
Si nous voulons continuer à profiter de toutes ces représentations, chacun(e) va devoir y mettre du sien.
Plus les infrastructures seront isolées sur le volet thermique, mieux ce sera.
Les organisateurs(rices) et les spectateurs(rices) seront davantage protégé(e)s des risques pesant sur leur santé, et les manifestations du spectacle vivant, de leur côté, verront leur impact environnemental décroître.
Alors comment faire ?
Outre l'idée d'améliorer l'isolation et d'installer des systèmes de chauffage et de refroidissement plus performants, la création d’espaces verts pourrait aussi être envisagée. À l’image de ce que commencent à faire certaines typologies de bâtiments plus “traditionnels”, les salles et festivals pourraient intégrer davantage de nature dans le cadre de leur conception, en créant des toits végétalisés, des jardins ou des espaces verts autour des lieux de spectacle.
Ceci pourrait contribuer à compenser les émissions de gaz à effet de serre (GES) générées (même de façon minime), améliorer encore l’isolation thermique des bâtiments et sensibiliser le public à la nécessité de protéger la biodiversité.
La scénographie est un sujet complexe, dans la mesure où elle se fait généralement le vecteur d’une vision artistique.
On ne va pas se mentir, l'équation est délicate. Surtout quand on doit considérer la multiplicité des variables qui entrent en ligne de compte.
Prenons un exemple : en 2022, le groupe Indochine a organisé une tournée de stades (et de stades uniquement) à travers la France.
Sur le papier, une telle configuration mérite qu'on s'y arrête un instant, car elle suggère d'intéressantes pistes de réflexion, tout en soulignant les principales problématiques relatives à ce type d'événement.
Tout d'abord, quand on privilégie une scène centrale, la capacité d’accueil du stade se trouve maximisée - contrairement à la configuration “traditionnelle” qui entraîne de facto l'inaccessibilité d’une partie des sièges.
À titre illustratif, le stade Pierre Mauroy (localisé aux abords de Lille) dispose d’une capacité d’accueil allant de 27 000 à 70 000 places. La structure peut accueillir 50 000 spectateurs en configuration dite “stade”. En plaçant la scène au centre, la majorité des places sont utilisables, et il devient possible de porter la capacité totale à 60 000 spectateurs (ce seuil pouvant sûrement varier en fonction de la taille de la scène et des aménagements nécessaires), soit une augmentation de 20 %.


Ce type de scénographie (dont l’esprit a également été expérimenté par d’autres artistes de renom tels que U2 et Ed Sheeran) permet aux artistes d’accueillir davantage de spectateurs à l’occasion d’une seule représentation.
Au lieu de multiplier les dates de concert en divers endroits, nous pourrions envisager la possibilité de développer des tournées reposant sur l’exploitation des sites permettant d’accueillir un maximum de personnes à l’occasion d’une représentation (le “maximum” variant bien sûr en fonction du degré de notoriété de l’artiste), ce qui permettrait :
Deux problématiques se posent toutefois.
Pour minimiser l'impact lié au déplacement, il est impératif que la salle ou le stade en question soit directement accessible via les transports en commun et localisé au sein d’une ville hôte bien desservie par le réseau ferroviaire. Le Stade de France en région parisienne ou le Groupama Stadium en région lyonnaise (pour ne prendre que ces deux exemples) satisfont ces deux critères.

Sur le plan matériel, l’écoconception doit être privilégiée au maximum.
Il s’agit de repenser la manière de produire des spectacles dès les premières étapes du projet, en misant sur l'utilisation d’éléments constitués de matériaux recyclés ou réutilisables pour les décors, les costumes et les accessoires.
Une enquête très intéressante avait d’ailleurs été menée en 2022 par ArtCena (le Centre national des arts du cirque, de la rue et du théâtre) auprès de certain(e)s professionnel(le)s.
L’éco-conception d’un élément, quel qui soit, est un exercice complexe mais pas irréalisable à condition d’avoir les bons outils. Pour éco-concevoir convenablement un produit, les professionnels de la comptabilité carbone recommandent de recourir à l’Analyse de Cycle de Vie (ACV). Une technique d’évaluation qui décortique scrupuleusement chaque étape de l’existence d’un produit, et évalue l’impact environnemental induit à chacune d’elle. Pour en savoir plus n’hésitez pas à consulter notre article sur le sujet.
Nous l’avons déjà évoqué : les salles de spectacle les plus anciennes - mais aussi des infrastructures plus récentes - disposent hélas de systèmes énergétiques inefficaces. C’est la raison pour laquelle il est indispensable de travailler à l'amélioration de l'isolation thermique.
Inutile de tourner autour du pot : en matière d’énergie, les renouvelables doivent être davantage mises à profit.
Compte tenu de l’impact environnemental des panneaux solaires au moment de leur fabrication, par exemple, le monde du spectacle vivant pourrait entreprendre une forme de concertation, en vue de développer une politique de réemploi et de location d’équipements techniques.
Une telle politique permettrait aux artistes de partager l’usage de certains matériels et de maximiser le retour sur investissement - au lieu que des panneaux solaires fabriqués au prix d’une certaine empreinte carbone demeurent stockés dans un hangar pour n’être sortis qu’une fois tous les quatre ans. Cette organisation s'appliquerait également aux dispositifs d’éclairage, de sonorisation ou de décors.

Le covoiturage constitue l'une des solutions les plus simples à mettre en œuvre pour les spectateurs.
Les plateformes comme Blablacar permettent facilement de rentrer en contact avec d’autres individus désireux de partager un véhicule, ce qui permet de rentabiliser le coût carbone induit par le déplacement.
Sachez d’ailleurs que des plateformes spécialisées dans le transport d’individus se rendant à des festivals et autres événements culturels ont vu le jour à l’image de Festicar.
En 2013, le Collectif des Festivals suggérait aussi de créer de places de parking “vertes” pour valoriser les voitures transportant au moins 4 passagers à l’arrivée au festival. Dans la même veine, des réductions tarifaires pourraient s’appliquer aux spectateurs et festivaliers se mobilisant en faveur de cette démarche.
Côté organisateurs, la mise en place de navettes en provenance des principales gares constitue, là encore, une piste à explorer.
Ces navettes pourraient emprunter un trajet faisant étape à divers points de rassemblement fixés au préalable, sur la zone attenante au lieu du spectacle, ce qui contribuerait à réduire le nombre de voitures individuelles utilisées.
Dans l’idéal, le recours aux bus à faible émission ou aux véhicules électriques serait évidemment à privilégier.
Un modèle d’incitations financières pourrait aussi être pensé, afin de proposer ces navettes à prix réduit ou de façon gratuite aux détenteurs de billets.
Certains festivals européens comme Glastonbury ont commencé à promouvoir intensivement le recours au train pour se rendre à l’événement.
Dans le cas du Glastonbury Festival, ce dernier avait conclu en 2024 un partenariat avec Trainline, qui proposait des réductions sur les tickets des futurs festivaliers, sous réserve d’acheter ces derniers plusieurs semaines en avance.

Dans le cadre de son guide, le Collectif des Festivals avait ainsi soumis de premières pistes de réflexion, en vue de traiter cette problématique liée aux déchets (voir ci-dessous).
De façon générale, il est important que les organisateurs(rices) apprennent à promouvoir intensivement l’utilisation des transports en commun. Ceci, en fournissant des informations précises quant aux horaires, aux liaisons et aux options disponibles.
Mais le transport n’est pas le seul sujet auquel les artistes et leurs équipes peuvent contribuer à sensibiliser.
À l'occasion de sa tournée Music of the Spheres, Coldplay avait positionné des vélos électriques en pleine fosse. Ces vélos, une fois activés, permettaient au public de contribuer à alimenter la salle de concert en énergie. De même que le plancher cinétique qui avait été installé, là encore, au niveau de la fosse.
Bien sûr, cette contribution n’aurait pas permis à elle seule de répondre aux besoins énergétiques induits - loin s’en faut. Il ne s’agissait pas de compter sur ces vélos ou ce sol pour assurer le show.
En 2019, le groupe Coldplay avait donc décidé de mettre sur la table le sujet de son impact environnemental, en proposant de premières solutions en vue d'y remédier.
Une initiative inédite à ce niveau, qui n’a pas manqué de s’attirer des commentaires parfois insultants (les membres de Coldplay ont par exemple été taxés “d’idiots utiles du greenwashing”). Or, si on peut légitimement évaluer le bilan de cette fameuse tournée pour en tirer les enseignements, le dénigrement, lui, ne s'inscrit en rien dans cette démarche constructive.
Pour sûr, nous ferions de jolies économies de CO2 si nous décidions de mettre un terme aux manifestations de type concert et festival dans l’intérêt de la lutte contre le changement climatique. C'est ce qu'a décidé le groupe Shaka Ponk le 30 novembre dernier, en faisant définitivement ses adieux à la scène...
Mais est-ce vraiment la bonne solution ? Faut-il mettre à égalité une sphère culturelle qui contribue au maintien du peu de lien social qu'il nous reste (à une époque où nous passons un temps considérable devant nos écrans), et des entreprises produisant des vêtements de piètre qualité que personne ne portera jamais - ou si peu ?
Ce débat n'est pas propre au spectacle vivant. Il concerne un spectre beaucoup plus large englobant, en vérité, la totalité de nos activités sur le plan économique.
Devrait-il donc exister une forme de "hiériarchie" entre secteurs d'activité, fondée sur leur degré de contribution au bien-être global de la société ?
C'est une question épineuse, mais qui ne devrait pas être ignorée.